Contre la pandémie, démocratie : la leçon de choses

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SOURCE : Arguments pour la lutte sociale

Les annonces de Macron sur la pandémie, jeudi soir 12 mars, permettent de montrer en quoi, contre la pandémie, la démocratie serait plus efficace.

La mesure phare, si l’on peut dire, est donc la fermeture totale, pour des semaines, de la totalité du service public de l’Éducation nationale ainsi que des crèches. Le même jour en fin d’après-midi, le dangereux ministre Blanquer démentait encore toute mesure de ce type : il n’était manifestement pas dans la confidence du petit coup d’État. Le lendemain matin, il n’a toujours pas répondu aux questions que se posent les personnels : faut-il venir quand même ? Que doivent faire les administratifs et les services de Vie scolaire ? Que deviennent les primes de REP+ ? Qu’en est-il des conseils de classe et autres réunions programmées ? Etc.

Blanquer s’est contenté de proclamer, en bon petit soldat passablement ridicule, que l’enseignement à distance allait fonctionner. Ce qui est une vaste plaisanterie : aucun outil n’est au point pour permettre, non l’équivalent des cours en classe que l’on ne saurait remplacer comme il le prétend, mais un suivi minimum pour tous les élèves. Une chose est certaine : après la Bérézina du « Bac » Blanquer, voila une année scolaire totalement désorganisée, un service public essentiel mis par terre.

Oui mais, c’était nécessaire et il est bon que les atermoiements aient pris fin, disent les dirigeants syndicaux et FCPE. Peut-être à ce stade, mais ce revirement brutal de « on ne ferme surtout pas, apportez (sic) vos enfants à l’école » à « tous dehors », est typique d’un régime autoritaire qui ne sait pas gérer ces situations et qui craint plus la démocratie que l’épidémie. Il est évident que la chose aurait du et pu être discutée, mise sur la place publique, depuis des semaines, et donc préparée ou amorcée de manière progressive. De même, le fameux « enseignement à distance » pourrait être autre chose qu’un gag dans une pochette surprise ministérielle, bien des professionnels, méprisés par les sachants ministériels, s’y étant attelés depuis longtemps.

Cette mesure a des conséquences en cascade pour les familles et les salariés. En dehors de la faveur généralisée faite aux entreprises qui peuvent reporter « charges », c’est-à-dire paiement de la part socialisée du salaire (qu’on l’appelle salariale ou patronale) et impôts à la demande, rien ne garantit qu’entre chômage partiel contraint et contrainte au travail salarié en « mode contamination », les salariés ne vont pas perdre sur tous les tableaux.

Elle s’ajoute à l’interdiction faite, par simple oukase ministériel, de rendre visite aux parents et aux vieux dans les EHPAD, qui ouvre la voie à une interdiction de déplacement vers les personnes âgées de plus de 70 ans, non prise mais qui pourrait l’être. De telles décisions auront des conséquences meurtrières alors que les personnels des EHPAD n’ont toujours pas de masques pour protéger les mêmes vieux.

Les mesures brutales prises à retardement caractérisent la méthode « française », en fait la méthode V° République-Macron. La comparaison avec la Corée du Sud est intéressante : la chronologie et la propagation de l’épidémie y sont au départ similaires à l’Italie, et donc, avec un décalage d’une dizaine de jours, à la France, mais le nombre de cas est à présent inférieur et surtout le nombre de morts (66 morts en Corée du Sud à ce jour pour 7869 cas ; Italie : 12462 cas et 827 morts ; France : 2284 cas et 48 morts). Méthode mise en œuvre en Corée : tester tout le monde et faire peu de confinements. En Italie : peu de tests et des confinements rapides, médiatisés, massifs. On peut comparer les résultats. En France : très peu de tests, de nombreuses familles consignées mais non testées, et hésitation entre pas ou très peu de confinements et mises en quarantaine massives par à-coups. On peut craindre les résultats …

D’autant que le maintien du premier tour des municipales n’est pas en cohérence avec les autres mesures annoncées. Durant la journée de jeudi, le JDD a lancé une rumeur sur l’annonce par Macron de l’article 16 et du report des élections. Cela a permis au président du Sénat, le LR Gérard Larcher, de démentir et de lancer une déclaration de guerre au seul report des municipales. Macron n’en a rien fait. Si nous étions en démocratie, au lieu d’avoir été l’objet d’une attente incertaine de ce qui sortirait de la bouche du petit empereur, ce report, nullement absurde au point de vue épidémiologique loin de là, aurait été discuté dans la transparence des semaines à l’avance …

Incohérence : on met par terre l’école publique, on maintient les élections (mais la question va se reposer pour le second tour), et, concernant l’Hôpital public, on fait des éloges mais on ne prend pas de mesure pour le doper, autre qu’écarter les opérations chirurgicales programmées non urgentes et rappeler les retraités … 17500 lits de nuit ont été fermés en 6 ans. On va le payer. On rappelle au passage que 40 % des lits de nuit disponibles dépendent du secteur privé hospitalier. Une mesure rationnelle s’impose :réquisition des moyens de ce secteur au même titre que pour le public !

De même que l’on va payer le choix politique coupable de faire le moins de tests possibles, conduisant selon toute vraisemblance à sous-évaluer grossièrement le niveau réel de contamination dans tous les départements.

Pendant ce temps, le coronavirus est apparu dans les camps de réfugiés de l’île de Lesbos : là aussi, le confinement forcé des populations, nouvelle panacée des gouvernants, va les livrer à l’épidémie.

Non, moins que jamais, l’heure n’est à l’union nationale. La responsabilité devant l’épidémie requiert plus que jamais la critique et la liberté. « Le temps n’est pas à la polémique, mais à la discipline » (Manuel Bompart de la « France insoumise »). Quelle discipline ? Oui à la discipline de l’autodéfense sociale. Mais cette discipline là exige la polémique, c’est-à-dire la critique impitoyable d’une gestion non démocratique qui est bel et bien en train d’affaiblir la nécessaire autodéfense sociale. Et les comptes seront réglés !Le 13-03-2020.

Dernière minute : le premier ministre vient d’annoncer l’interdiction de tous les rassemblements de plus de 100 personnes …


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