“Nous avons été 300 dans le grand hall du CHU à manifester notre volonté de résistance”

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SOURCE : NPA

Entretien avec X., infirmière en psychiatrie au CHU de Saint-Étienne.

Pouvez-vous raconter brièvement les mobilisations depuis un an et demi sur le CHU ?

Il y a des mobilisations depuis longtemps portant sur les conditions de travail. Des restructurations anciennes du CHU ont été accompagnées de nombreuses pertes d’emplois et de fermeture de lits. Les batailles portaient en général sur les conditions de travail et sur la prise en charge des patientEs. Derrière ces restructurations, il y avait la volonté de gérer le CHU comme une entreprise. La santé, à mon sens, c’est droit pour tous. En tant qu’infirmière, ma priorité a toujours été l’amélioration de l’état de mes patientEs. Mais ce n’est plus une priorité dans l’établissement depuis les restructurations, qui sont décidées d’en haut, sans concertation ni consultation. Cela cause une grande souffrance des soignantEs et une désaffection des médecins. Tout ceci implique une baisse du progrès et de la recherche, et des médecins qui quittent l’hôpital public. En plus, sur le CHU nous avons une administration retorse.

Quelles sont vos revendications ?

Je travaille en psy et il y a une certaine dévalorisation par rapport aux autres services. Sur le plan professionnel, nous n’avons plus les moyens d’accueillir de nouveaux/elles patientEs, il y a une liste d’attente de deux ans pour entrer dans les services psy. La crise du COVID nous a permis de retrouver un esprit d’équipe et un sentiment d’appartenance à une corporation. Mais notre direction s’en fout, elle a les yeux fixés sur des tableaux Excel. Nous demandons une reconnaissance professionnelle pour tout le personnel infirmier. Nous sommes sous‑payéEs aussi, comme tous les personnels soignants en France.

Initialement, nous revendiquons des moyens pour pouvoir faire notre travail correctement, des moyens pour soigner les patientEs. Nous sommes entraînéEs dans un tourbillon de restructurations, qui entraîne une absence totale de visibilité à moyen et long terme quant à l’avenir de notre CHU. Chaque matin, c’est le choc quand on arrive et qu’on découvre les nouvelles décisions de l’administration concernant notre travail.

Ces derniers jours, celle-ci nous a dit qu’il n’y aura ni suppression de poste, ni fermeture de lit. Mais nous, ce que nous voulons, c’est ouvrir des postes et ouvrir des lits, car ici c’est déjà la cata.

À quoi est due la mobilisation de jeudi et vendredi ?

L’annonce d’un nouveau projet de restructuration a vu une réaction immédiate. Nous avons été 300 dans le grand hall du CHU à manifester notre volonté de résistance, malgré le plan « blanc » qui interdit toute grève dans les hostos. Nous réagissons à nos conditions de vie et de travail. Nous sommes épuiséEs par la crise du COVID et, sans doute, la direction a pensé que c’était le bon moment pour faire passer ses plans : des consignes contradictoires, des décisions opaques. Le dialogue ? Il n’y en a pas. Nous, les infirmières, ne voulons pas être considérées comme des pions et refusons la déshumanisation de notre travail que l’on prétend nous imposer.

Nos revendications sont claires : la défense de nos conditions de travail, cas nous ne soignons pas des machines mais des êtres humains ; de la clarté sur les projets du CHU ; la participation du personnel à l’élaboration de ces projets. L’ARS fait des contrôles Qualité : encore plus de normes mais les patientEs et les soignantEs sont oubliéEs.

Quelles sont vos perspectives ?

Actuellement, avec le plan « blanc » il ne peut y avoir de grève. C’est un muselage organisé. Nous avons été choquéEs par la rhétorique guerrière du président. Nous ne sommes pas en guerre. La guerre tue des gens, nous, on les soigne. La médaille, on n’en veut pas, la prime non plus. On veut un salaire juste pour un travail qualifié.

Il est nécessaire de rénover l’hôpital public. Ce doit être un projet de société. Que vont devenir nos malades, nos vieux ?

Propos recueillis par Denis


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