Minneapolis et la crise du capitalisme américain

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SOURCE : Arguments pour la lutte sociale

Par oaklandsocialist le 31 mai 2020.

Divisée, dirigée par un président dément et incontrôlable qui est absolument méprisé et n’a, parmi de larges couches de la société, aucune crédibilité quelle qu’elle soit, avec des forces de police incontrôlées à travers le pays , la classe capitaliste américaine glisse rapidement vers sa plus grande crise depuis la Guerre civile américaine

Le procureur collabore avec Chauvin

Sous le regard non seulement des Américains mais du monde, les forces de l’ordre de Minneapolis mettent en place la défense de Derek Chauvin. Dans le document d’accusation retenu contre lui, ils écrivent : « L’autopsie n’a révélé aucune signe physique permettant de diagnostiquer une asphyxie traumatique ou une strangulation. M. Floyd avait des problèmes de santé sous-jacents, notamment une maladie coronarienne et une hypertension cardiaque. Les effets combinés de la contention de M. Floyd par la police, ses problèmes de santé sous-jacents et toute potentielle intoxication de son système vital ont probablement contribué à sa mort. »

Cela intervient après que le procureur a en effet affirmé que Chauvin n’avait pas l’intention de tuer George Floyd. (Une telle intention signifierait une accusation de meurtre au deuxième degré plutôt que le troisième degré dont Chauvin est accusé.) Cela révèle que déjà à ce moment, le procureur du comté Mike « preuve-qu’aucun-crime-n’a-été-commis » Freeman collabore toujours avec Derek Chauvin et le département de la police de Minneapolis. Ils sont en train de mettre en place la défense de Chauvin, qui sera que George Floyd n’est pas mort d’une pression extrême sur la gorge et l’artère carotide pendant près de neuf minutes ; il est mort de causes naturelles. Freeman refuse également de prononcer l’inculpation des complices de Chauvin, bien qu’il sera probablement contraint de le faire en fin de compte.

 Quelques mauvais flics ?

Il n’est pas non plus possible de prétendre que Chauvin était simplement l’un des 5% proverbiaux des « mauvais » flics. En premier lieu, que faisaient les quatre autres flics ? Deuxièmement, Chauvin a une longue, longue histoire de comportement criminel. Pourquoi, alors, toute la chaîne de commandement lui a-t-elle permis de continuer ? Non, c’est toute la police de haut en bas. Même ceux qui pourraient ne pas brutaliser et assassiner, protégeront ceux qui le font. Même un ancien chef d’une association de policiers noirs a expliqué sur CNN que même les flics noirs le feraient.

Ce n’est pas non plus l’application de la loi à Minneapolis seulement. La police d’État est même allée jusqu’à arrêter une équipe de tournage de CNN. Alors que le gouverneur du Minnesota, Tim Walz, s’est excusé, la police de l’État a, de fait, justifié l’arrestation en disant simplement que l’équipe a été libérée une fois que leur identité a été confirmée. Non seulement ils étaient clairement identifiés depuis le début, mais ils se conformaient également aux ordres de la police au moment de l’arrestation. Ce n’est pas le genre de chose qu’une police fait si elle se soucie le moins du monde de son image publique.

Le capitalisme américain est prisonnier d’un conflit inhérent à sa propre construction. La suprématie blanche a été essentielle à la domination du capitalisme américain depuis sa création. Ayant soumis les Noirs pendant si longtemps, ils doivent laisser les flics se déchaîner dans les rues de la communauté noire. Mais de temps en temps, quand les yeux du reste de la société sont braqués sur eux, ils veulent retenir ces mêmes flics. Alors c’est trop tard.

« Tu ne gouverneras pas uniquement par la peur »

Le courant dominant de la classe capitaliste américaine se soucie profondément de cette image. Ils savent que gouverner par un usage absolu de la force est, par nature, facteur d’instabilité. Envers les Noirs, cette forme de domination a été beaucoup plus répandue, mais même là, un certain degré de persuasion a été utilisé. C’est ce qui est représenté par la promotion de toute une couche de fonctionnaires noirs, y compris le chef du département de la police de Minneapolis, un éminent présentateur de CNN et l’ancien président des États-Unis. Le meurtre de Floyd et les événements connexes sont en train de ruiner cet effort à long terme pour construire une base sociale parmi les Noirs américains.

Ensuite, il y a la jeunesse blanche, dont les perspectives économiques réalisent un tour de disparition magique. La base du courant dominant de la classe capitaliste américaine disparaît également chez ces jeunes.

Solidarité

Un aspect des manifestations qui revêt une grande importance est leur composition multiraciale. Il y a eu des soulèvements similaires après que les policiers agresseurs de Rodney King ont été libérés. Dans ce cas, cependant, ils étaient presque 100% noirs et au moins dans South Central à Los Angeles, les manifestants ont agressé tous les Blancs qui se trouvaient coincés dans la zone, comme par exemple un Teamster qui la traversait en conduisant son camion. Cette fois, la solidarité inter-raciale est considérée comme un fait acquis.

La stratégie du courant dominant de la classe capitaliste semble assez claire : face à l’indignation généralisée contre ce meurtre gratuit et sachant qu’ils ne pourraient pas contrôler leurs voyous en uniforme, ils ont tenu la police éloignée des manifestants et même de la rue. Cela a permis à leurs médias de remplacer l’image du meurtre par une image d’émeutiers, d’incendiaires et de pillards. Une fois cette image imposée, ils auraient ensuite lancé à nouveau la police pour mettre fin aux manifestations.

Cette stratégie a été presque immédiatement paralysée lorsque la police de Minneapolis a déclenché une salve de gaz lacrymogène sur une foule paisible dans cette ville, alors qu’une équipe de caméras de CNN se tenait juste à cet endroit. Après avoir eu son équipe arrêtée quelques jours plus tôt, CNN n’a pas hésité à commenter cela à maintes reprises – des manifestants pacifiques agressés par des gaz lacrymogènes.

Trump

Le président dément est dans une impasse. Sa première et instinctive réaction a été de retourner à ses racines racistes. « Les pillards créent des tireurs », a-t-il tweeté. Pourquoi a-t-il ensuite fait demi-tour et reculé et pourquoi est-il resté relativement silencieux depuis, plutôt que de fouetter sa base suprémaciste blanche ? La raison en est qu’une partie de sa stratégie de réélection consiste à gagner 10 à 15% des électeurs noirs.

Quant à la base suprémaciste blanche de Trump, on soupçonne de plus en plus qu’ils infiltrent les manifestations. Payday Report, par exemple, a rapporté qu’un journaliste de KDKA* a été renversé et frappé de coups de pied répétés par quatre « manifestants » blancs et a été sauvé de blessures pouvant causer la mort par certains manifestants noirs. Il y a aussi une vidéo d’un homme blanc à l’air suspect qui brise les fenêtres avec un marteau. Quand il se trouve face à un manifestant noir, le Blanc s’enfuit… vers les cordons de police.

Médias capitalistes

Les médias capitalistes sont également en crise. D’un côté, le média le plus populaire – Fox News – est aussi discrédité que la police auprès de millions de personnes. La crise du reste des médias est démontrée par les gémissements de Don Lemon sur CNN, qui semble démoralisé. Hier soir, il a passé presque toute son émission à déplorer les divisions de la société américaine, à parler de la nécessité de guérir l’Amérique, à se plaindre que la police et le président soient incontrôlables.

Et tout cela ne prend même pas en compte la crise sanitaire la plus grave depuis plus de 100 ans, qui ne fera qu’empirer.

Elle ne tient pas non plus compte de ce qui était une crise économique à évolution lente qui est maintenant également hors de contrôle.

Crise générale

Cette crise ajoute également à l’affaiblissement de l’impérialisme américain par rapport à ses deux principaux rivaux, les impérialismes chinois et russe. Le principal rival – l’impérialisme chinois – a été sérieusement affaibli par la pandémie de Covid-19, originaire de Chine. A ce fait s’est ajouté sa dissimulation par le régime chinois pendant plusieurs semaines ou plus. Elle a sérieusement affaibli la crédibilité de ce régime, en particulier dans l’ancien monde colonial. Maintenant, cette crise du capitalisme américain va dépasser cela.

En bref, le capitalisme américain bascule sur la voie de sa plus grande crise depuis la Guerre civile américaine. Plus grande même que dans les années 1930 ? Alors, le désastre économique était plus fort et la classe ouvrière était mieux organisée, mais ils avaient le débouché d’une nouvelle guerre mondiale. Cette fois, en raison du niveau des armes de destruction massive, une nouvelle guerre mondiale menacerait d’anéantir la société humaine.

Où sont les syndicats ?

Une telle crise est un moment de danger extrême, mais aussi d’opportunité extrême. En ce moment, où est la classe ouvrière organisée ? Où sont les syndicats ? Étranglés depuis des décennies par leurs propres dirigeants, ils sont de nouveau portés disparus. De la même manière que les dirigeants trahissent leurs propres adhérents à leur travail, ils trahissent la classe ouvrière en général dans la société dans son ensemble. Les syndicats des chauffeurs d’autobus disent maintenant à leurs membres de refuser de transporter les personnes arrêtées lors des manifestations. Cela s’est produit après que les conducteurs eux-mêmes ont commencé à agir. La base va-t-elle maintenant commencer à s’organiser? Cette crise la conduira-t-elle à briser son étranglement ? Ce sera la clé qui ouvrira la voie à suivre.

Note :

* KDKA (1020 kHz AM ) est une station de radio basée à Pittsburgh, Pennsylvanie

Source :

https://oaklandsocialist.com/2020/05/31/minneapolis-and-the-crisis-of-us-capitalism/

Traduction par nos soins

 


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