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SOURCE : Arguments pour la lutte sociale
Le gouvernement pousse le bouchon contre les libertés, tant publiques que syndicales et individuelles, de plus en plus loin. Et ce faisant il rouvre grand la crise de régime.
Au prétexte de la crise sanitaire, un « conseil de défense » dont les délibérations sont secrètes et dont les décisions sont autant de révélations faites au bon peuple en court-circuitant toutes les institutions légales, fut-ce celles de la V° République, détient l’essentiel du pouvoir, de manière discrétionnaire et incontrôlée. C’est lui qui a décidé, par exemple, de l’ « essentiel’ » et de l’ « inessentiel » : inessentielles, les chaussures, les slips, les livres et les promenades en forêt …
Des projets de loi sont pondus qui, dans la forme, ne sont pas des lois, mais des agrégats incohérents de décisions d’ordre public. La question de la forme est très importante : la loi doit être explicite et définissable. Ce n’est plus le cas.
Parmi ces lois, la goutte d’eau qui a fait déborder le vase est celle dite de la « sécurité globale ». En son article 24, elle interdit de prendre des images de violences policières. Dans d’autres articles, le même projet de loi autorise inversement les autorités à diffuser publiquement des images de mauvais citoyens ou supposés tels prises par des caméras de surveillance, et confère des pouvoirs de police aux sociétés de gardiennage privées.
Le projet de loi censé « lutter contre le séparatisme » – alors que pour lutter, non contre le séparatisme, mais contre les formes violentes de l’islamisme politique, les dispositions d’ordre public existantes sont largement suffisantes – entend aller vers un « islam de France », formule concordataire ouvrant une brèche, appelée à s’élargir, dans la loi de séparation des églises et de l’État de 1905.
Cette loi, avec la loi sur la liberté de la presse de 1881 (ainsi que la loi de 1901 sur la liberté d’association), forme un bloc légal, souvent qualifié de bloc de constitutionnalité par des juristes. Cet ensemble n’a pu être liquidé par la V° République, bonapartisme en ce sens demeuré inachevé. Il y a, dans ce régime, contradiction entre l’héritage des républiques parlementaires soumises à la pression sociale des exploités (loi de 1905, libertés publiques, conventions collectives, Sécurité sociale …) et les lois autoritaires qui le contredisent (loi Debré antilaïque, consubstantielle à l’avènement de la V° République, nombreuses lois liberticides, lois dirigées contre le code du travail, loi Juppé contre la Sécu et les retraites …).
Macron, à la sauvette et de manière désordonnée, tente de passer du consulat à l’empire, de réaliser le potentiel dictatorial de la V° République, en détruisant le bloc des lois libérales garantissant les droits individuels : droit à la sureté contre l’oppression inscrit dans la Déclaration des droits de 1789, liberté de la presse, laïcité.
Sa manière désordonnée, ubuesque et à la sauvette, erratique et incertaine, indique sa faiblesse. Il risque d’affaiblir ces institutions présidentielles qu’il voudrait renforcer, comme lorsqu’il court-circuite son propre gouvernement par les « conseils de défense ».
Ce mardi 17 novembre au soir, l’afflux spontané de manifestants en direction de l’Assemblée nationale a signifié que la coupe est pleine et que la capacité de mobilisation démocratique est là, puissante. Ce mouvement continue ce samedi, réalisant l’unité des organisations syndicales – on retrouve CGT, FO, FSU, Solidaires – et démocratiques. Il va continuer.
Pendant ce temps, l’Assemblée a adopté à une large majorité de députés le fameux article 24. L’Assemblée ? Est-ce bien une Assemblée ? Elle n’a aucune légitimité.
Aplutsoc vient de publier une série d’articles, et va continuer, sur la droite sénatoriale et les retraites, la ruine des petits commerçants et artisans, Bridgestone et les licenciements, cette loi « Sécurité globale », la gestion de l’épidémie et l’Hôpital, conduisant invariablement à une seule et même conclusion : il y urgence à chasser Macron.
L’ébranlement qui s’amorce, les tremblements qui se font sentir, confirment que ce n’est pas la préparation des présidentielles la tache de l’heure (et que de surcroit, on ne peut bien les « préparer » qu’en s’occupant de la réalité), mais celle de la troisième vague, après celles des Gilets jaunes et des retraites, sur une base supérieure, pour renverser ce régime et ouvrir la voie à la démocratie.
21-11-2020.