AVANT-PROPOS : les articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » ne représentent pas les positions de notre tendance, mais sont publiés à titre d’information ou pour nourrir les débats d’actualités.
SOURCE : Le Parisien
De nombreux acteurs économiques alertent sur le risque que les salariés âgés de plus de 50 ans payent un lourd tribut à la crise économique liée à l’épidémie de Covid-19.
De nombreux acteurs économiques alertent sur le risque que les salariés âgés de plus de 50 ans payent un lourd tribut à la crise économique liée à l’épidémie de Covid-19.
Pour paraphraser un récent discours présidentiel, on pourrait dire que c’est dur d’avoir plus de 50 ans, en France, en 2021. Déjà touchés par la crise du Covid-19, les seniors pourraient bientôt l’être également sur un autre plan, celui de l’emploi.
Début février, l’Insee a annoncé que 360 500 emplois avaient été détruits dans le secteur privé en France en 2020, soit une baisse de 1,8 % qui intervient après cinq années de hausse consécutives. Nombre d’experts tirent la sonnette d’alarme. Ils appellent le gouvernement à prendre en compte, outre les jeunes, une autre catégorie d’actifs, les salariés en fin de carrière, âgés de plus de 50 ou 55 ans, dont le taux d’emploi pourrait aussi diminuer à mesure que les restructurations et plans de départs volontaires se multiplient. Une situation d’autant plus préoccupante que la France, traditionnellement à la traîne des pays de l’OCDE en la matière, était parvenue, ces dernières années, à renverser la tendance et augmenter le taux d’emploi des salariés les plus âgés.
Un plan seniors avec des aides comme pour les jeunes
« Nous considérons que les seniors vont être plus exposés au chômage dans la période qui s’ouvre, souligne Benoît Serre, directeur des ressources humaines et vice-président de l’ANDRH (Association nationale des directeurs de ressources humaines). De son côté, Gilles Gateau, le directeur général de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres) insiste sur la nécessité d’être « très attentif à ce que la France ne connaisse pas une régression sur le sujet ». « Du côté des entreprises, la tentation peut être très forte de proposer des mesures de départ anticipé », alerte-t-il. L’ANDRH se prononce notamment en faveur d’« un plan senior à la hauteur du plan des jeunes » avec l’extension aux seniors et chômeurs de longue durée des aides à l’embauche déjà existantes pour les 18-25 ans.
Qu’en disent les premiers concernés ? « Dans ce contexte anxiogène, la crainte du licenciement augmente en particulier chez les plus jeunes et les seniors », note l’Apec dans son baromètre des intentions de recrutement et de mobilité des cadres rendu public début février. Les cadres seniors sont très inquiets quant à leur situation professionnelle : 84 % considérèrent que retrouver un emploi équivalent à celui qu’ils occupent aujourd’hui serait difficile, constate aussi l’Apec.
Les ruptures conventionnelles collectives pourraient faciliter les départs
Ces derniers mois, de nombreux grands groupes, comme Renault, Safran, Michelin ou encore ADP ont déjà incité leurs salariés âgés à partir en préretraite pour réduire leur masse salariale. Des dispositifs basés sur le volontariat des salariés et qui sont souvent actionnés par l’intermédiaire de ruptures conventionnelles collectives (RCC), outil créé par les ordonnances Macron de 2017. Pour rappel, ce dispositif permet à l’entreprise, par accord collectif, de supprimer des postes en dehors de tout licenciement ou raisons économiques.
« L’une des craintes des syndicats est que ce dispositif soit utilisé pour faire partir des seniors. Pour l’entreprise, c’est moins coûteux que les plans de sauvegarde de l’emploi. Les conditions sont négociées, cela peut donc faciliter la mise en place les plans de départ », souligne Christine Erhel, économiste au Cnam, spécialiste du marché de l’emploi. Pourtant, si l’on s’en tient aux chiffres officiels, les personnes de plus de 50 ans ne semblent pas pour l’instant plus touchées que les autres par le chômage : leur nombre en catégorie A a augmenté en 2020 de 7 % quand, dans le même temps, le nombre de demandeurs d’emploi s’est accru au global de 8 %.
Les demandeurs d’emploi âgés restent inscrits au chômage plus longtemps
Mais ces chiffres pourraient évoluer dans les mois à venir. « Il ne faut pas minimiser le phénomène de renoncement qui touche actuellement les demandeurs d’emploi, estime Gilles de la Barre, le président de l’association Solidarités nouvelles face au chômage (SNC). Ces derniers mois, ils ont l’impression que le marché de l’emploi est bloqué et ne s’inscrivent plus. Mais une fois qu’ils entrent dans les statistiques, les plus de 50 ans ont une durée d’inscription largement au-dessus de la moyenne. »
Autre facteur, leur rémunération, souvent plus élevée, qui les expose davantage. « C’est récurrent : quand une entreprise cherche à se restructurer, elle regarde les postes les plus coûteux. Or, ce sont les salariés les plus anciens qui coûtent cher, constate aussi Olivier Mériaux, directeur d’études au cabinet Plein sens et coauteur, en 2019, d’un rapport sur l’emploi des seniors. Avant de mettre en garde : « En souhaitant trouver des réponses rapides à une situation difficile, les entreprises risquent de laisser partir des compétences invisibles et précieuses ».