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SOURCE : Arguments pour la lutte sociale
Voici un an que le monde vit sous le signe du Covid. Propagation de la pandémie et dislocation des structures internationales des échanges telles que la prétendue « mondialisation capitaliste » les avaient configurées depuis un demi-siècle, se sont combinées. La chaîne d’explosions révolutionnaires, notamment en Amérique du Sud et centrale et au Proche et Moyen Orient, commencée avant la pandémie, d’abord perturbée par la crise, a repris, surtout à partir de l’explosion démocratique et antiraciste aux États-Unis l’été dernier, dont la défaite de Trump a été une conséquence. Le caractère révolutionnaire, porté par l’auto-organisation populaire, du mouvement « paysan » indien dont les vagues rejoignent les mouvements populaires de toute l’Asie du Sud, les manifestations démocratiques en Russie, et, ces lundi 22 et vendredi 25 février 2021, le fier et massif retour du Hirak algérien, marquent le moment présent. La France ne saurait y échapper.
Voici donc un an aussi que la présidence macronienne, qui voulait restaurer un exécutif vraiment fort et autoritaire dans ce pays, surmontant les inachèvements de la V° République, étale ses méfaits au regard de la pandémie. Des années de destruction du service public hospitalier, destruction poursuivie en pleine pandémie, ont terriblement aggravé la situation. Le gouvernement français s’est illustré successivement en prétendant qu’il ne fallait pas porter de masques (printemps 2020), puis en sabotant le démarrage de ses propres campagnes de tests (automne 2020), puis de vaccinations (hiver 2020-2021). Il s’est tout aussi illustré en plaçant la prophylaxie publique sous l’égide de la peur du gendarme, multipliant les situations ubuesques et scandaleuses, ne sachant pas que faire entre laxisme et confinement total. C’est lui qui a nourri les complotismes et affabulations antiscientifiques en tous genres.
Le voila maintenant pris en étau. Selon la majorité des autorités scientifiques, les formes variantes du virus arrivent à toute allure. Le cap est mis non seulement sur les 100.000 morts, mais sur un mois de mars terrible. L’absurdité de la forme monarchique du pouvoir culmine dans ce fait que c’est Emmanuel Macron qui décide du confinement, du « couvre-feu » (légitimement soupçonné d’être contre-productif), et qui fait des « paris » sur la diffusion ou non d’un virus malin et mutant : Macron parie sur nos vies, est-ce acceptable ?
La démocratie, la décision s’appuyant sur l’information scientifique massive, le débat argumenté, sont plus que jamais bannis. La pandémie en France, c’est à la fois la condamnation finale du régime de la V° République et l’apothéose dangereuse et assassine de sa « gouvernance » « jupitérienne », macronienne.
C’est cette réalité qui devrait décider de la politique des organisations syndicales et des partis et courants politiques issus du mouvement ouvrier ou relevant de ce que l’on appelle la gauche. A deux reprises, de larges masses, soutenues par un sentiment populaire majoritaire, ont tenté d’affronter ce pouvoir, ce qui n’avait donc d’autre signification que de le chasser, ouvrant ainsi un processus révolutionnaire, démocratique, constituant : le 17 novembre 2018 des Gilets jaunes et ses suites etle 5 décembre 2019 de défense du droit à la retraite et ses suites. Le souffle de ces poussées populaires s’est rappelé lors des premières manifestations de l’automne 2020 contre la loi de « Sécurité globale ».
La réalité concrète immédiate que vit le plus grand nombre devrait dicter une politique simple : unissons-nous pour que cet exécutif cesse de nuire, qu’il cesse d’empêcher la lutte contre l’épidémie en imposant des poursuites antisociales d’activités économiques tout en verbalisant à 18h, qu’il cesse de casser l’Hôpital public et l’école publique par les fermetures de classes et la généralisation du contrôle continu pour le Bac, qu’il cesse d’aider aux plans de licenciements qui arrivent en masse, et qu’il cesse sa tentative de destruction des lois cristallisant des conquêtes démocratiques faisant obstacle à son action : droits fondamentaux, liberté de réunion, liberté de la presse, loi sur les associations, laïcité. Et comment cessera-t-il de nuire ?En partant ! Dehors !
Cette politique simple n’est pas celle des directions des organisations syndicales et des partis classés à gauche. Tous disent, avant tout, préparer les présidentielles, qui sont en 2022.
Et dans l’immédiat, beaucoup se sont lancés dans la « polémique » offerte par le gouvernement à propos de « l’islamo-gauchisme à l’université ». Pour l’immédiat, la France insoumise a écrit « à plusieurs partis dont PS, PCF, EELV, Génération.s, GDS, GRS, NPA, POI, LO, Ensemble ! … » pour leur dire qu’il « est indispensable de manifester une résistance déterminée à cette situation », à savoir la situation où les propos de Mme Vidal feraient que « les libertés publiques sont désormais en cause ». Le NPA a tout de suite répondu qu’en effet « une riposte est à construire de toute urgence pour combattre l’islamophobie, l’offensive liberticide, d’où qu’ils viennent, des sommets de l’État ou de l’extrême-droite la plus rance. »
Les libertés publiques sont en cause en France depuis plusieurs années. Sous Macron, nous avons connu la pire répression physique depuis la guerre d’indépendance algérienne, puis a été engagée fin 2020 une offensive liberticide combinée. La loi « Sécurité globale » avec de nombreuses dispositions répressives, et la loi « renforçant les principes républicains », souvent appelée loi « contre le séparatisme », par un renforcement inédit de la tutelle préfectorale sur les associations, cultuelles ou non, et l’amorce d’un encadrement de type concordataire de l’islam, forment le cadre de cette offensive.
La riposte n’est pas à « construire » mais à relancer : elle avait commencé massivement cet automne et c’est le mot d’ordre Macron démission qui s’est alors imposé dans les manifestations, associé à l’exigence de retrait de ces deux projets de loi, actuellement en « discussion » (les guillemets sont bien entendu de rigueur) au Parlement.
Non seulement la question du maintien en place de Macron, mais tout simplement le mot d’ordre unitaire de cet automne, celui du collectif formé par la LDH et les syndicats de journalistes, celui des intersyndicales CGT/FO/FSU/Solidaires/UNEF, à savoir le mot d’ordre de retrait de ces projets de loi, a disparu de la proposition de la FI aussi bien que de la réponse du NPA.
Le besoin immédiat est simple : contre Macron et la totalité de son gouvernement, premièrement il faut prendre le contrôle de la production des vaccins et appliquer les confinements et les mesures sanitaires sérieuses qu’exigent les élus locaux et les représentants du personnel dans les entreprises, deuxièmement il faut combattre les vagues de suppressions d’emplois globales et massives qui se succèdent, et ne pas laisser isolés les grévistes qui ont commencé ce combat en ouvrant la perspective d’une manifestation centrale à l’Élysée pour interdire les licenciements,troisièmement il faut exiger le retrait total des lois « sécurité globale » et « renforçant les principes républicains », tout cela se résumant dans une exigence démocratique :Macron démission !
Et qu’on arrête d’aider Macron en nous « amusant » sur la préparation des présidentielles ou sur la grande gigantomachie universitaire à propos de l’ « islamo-gauchisme » !
Ceci n’entraîne aucune indifférence aux présidentielles. Les lignes qui précèdent tentent de donner la manière dont on devrait les préparer sérieusement, si le régime tient jusque-là. L’orientation politique des directions syndicales et des directions politiques de « gauche » a effectivement pour conséquence que le semi-confinement et les incertitudes pèsent, que la lutte contre les licenciements ne s’est pas généralisée à cette étape, et que la lutte pour le retrait des projets de lois liberticides est menacée d’un rétrécissement sur le seul axe de la « polémique » offerte par Mme Vidal et non sur l’exigence de retrait de la totalité des projets de lois liberticides.
Dans cette situation, deux possibilités. D’abord, celle pour laquelle nous devons combattre : la généralisation et la centralisation de l’affrontement social avec Macron, mettant la France au diapason de l’Inde, de l’Algérie, du monde. Mais si cela tarde et que le mur des présidentielles approche vraiment, une candidature représentant la poursuite de ce combat avec suffisamment de surface pourrait-elle être imposée ? Ou se poserait-il plutôt la question du boycott actif de ce scrutin antidémocratique, visant à délégitimer toute présidence pour renverser ce régime ? Discutons-en.
VP, 26-02-2021.
Note de la rédaction sur la grève de la raffineurs de Grandpuits (77)
La grève contre le projet de Total délocalisant toute l’activité de raffinerie, s’est arrêtée de 13 février dernier par un vote de l’AG des grévistes qui, à deux voix près, se sont prononcés contre la reconduction après 40 jours d’une grève ultra-majoritaire à 80%, menée de manière unitaire et intelligente en obtenant des soutiens écologistes (PEPS, Amis de la Terre, Greenpeace…) et en se coordonnant avec de nombreuses grèves et luttes contre des plans de licenciements (TUI, Cargill, Sanofi, etc.). Dés que la pression des salariés s’est relâchée, CFDT et FO sont allés signer les mesures d’accompagnement du PSE. Si les salariés de Grandpuits continuent aujourd’hui à se battre contre les licenciements, c’est plus au plan juridique devant la DIRECCTE que par la mobilisation.
C’ est une nouvelle démonstration qu’on ne peut gagner boite par boite, aussi déterminés et intelligents soit-on. Grandpuits a essayé de briser l’isolement en constituant avec TUI et l’aide politique de militants révolutionnaires la coordination qui a appelé à la manif du 23 janvier pour interdire les licenciements, mais à cette étape cela n’a pas suffit à faire sauter le verrou politique des directions syndicales.