Crise démocratique : 40% des électeurs ont tout de même voté

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SOURCE : Frustration

Vous vivez dans une petite ville ou un village et vous n’avez pas voté hier, comme 59% des Français ? Ce matin, l’ensemble des chaînes de radio, de télé et les journaux parleront des citoyens de grandes villes qui ont voté. L’expression de “majorité silencieuse” n’aura jamais été aussi vraie.

Mais les politiques et les journalistes s’en foutent de vous. Les premiers ont bien compris que l’abstention pouvait les servir, à partir du moment où il n’y avait que des “bons” votants, bien mis, aisés et “diplômés” qui se rendaient aux urnes. Des gens raisonnables, ni trop à gauche, ni trop à droite, qui “croient” en la démocratie représentative (à ce stade, c’est bien une superstition), qui aiment le PS, EELV et la bonne droite bien de chez nous. Les autres, gilets jaunes, partisans du nouveau mouvement antiraciste, écologistes radicaux, qui ont eu l’indécence de troubler la petite routine politicarde durant ces deux dernières années, on les préfère loin de chez soi.

Trop heureux de célébrer la gauche bourgeoise, les journalistes de Libé ont réglé la question de l’abstention en un “Malgré…”.

Les seconds, les journalistes, sont un groupe homogène par leur niveau d’études et leur appartenance aux grandes métropoles. Ils ADORENT les élections municipales, cela fait environ 18 mois qu’ils spéculent sur le score d’Anne Hidalgo à Paris et, dans les grandes villes, de qui bouleversera tel ou tel vieux briscard réac. Ils n’ont pas envie que vous leur gâchiez la fête avec votre abstention et décrètent donc, depuis hier soir, que les absents ont toujours tort.

L’abstention a beau augmenter à chaque scrutin depuis les années 80, au point de devenir majoritaire lors des trois dernières élections (Législative, européenne puis municipale), elle n’a droit qu’à une ligne de discours ou d’article, généralement, et de l’ordre de la déploration abstraite. Qu’importe qu’elle soit davantage le fait des électeurs populaires et des jeunes que de tous les autres. Du moment que ça n’empêche pas de gagner des sièges, pourquoi s’embêter ?

Médiapart titre, schizophrène, La gauche et les écolos gagnent, les électeurs désertent”. On peut quand même parler de victoire, du coup ? Apparemment oui. La politique, mais sans vous, sans nous (la rédaction de Frustration s’étant majoritairement abstenue). “L’Humanité” n’est pas plus respectueux du résultat majoritaire. En Une du journal communiste, c’est la prétendue victoire de “la gauche” qui prend toute la page, et le taux d’abstention est glissé en haut en petit.

Communiste mais… journaliste quand même

La vraie question qu’il faut se poser aujourd’hui ce n’est pas “pourquoi les gens s’abstiennent ?” mais “pourquoi les gens votent encore ?”. De slogans de campagnes indigents à programme rikiki, ces partis et autres “alliances citoyennes” qui ont envoyé, au premier tour, des centaines de gens à la mort en les exposant au coronavirus malgré les avertissements clairs de la plupart des médecins, ont encore une minorité de la population prête à voter pour eux : ils ont bien de la chance.

Parce qu’il en faut de la foi et de l’abnégation pour se bouger un dimanche en faveur de listes EELV, socialistes ou gentiment droitardes. En pleine crise économique et climatique, croire que c’est Yannick Jadot, sympathique libéral qui n’a pas l’intention de renier un cheveu du sacro-saint droit de propriété, et les débris du PS – dont les électeurs semblent avoir oublié que c’est le parti de Hollande, Valls et El Khomri, qui vont nous sauver, c’est sacrément optimiste. Ou bien, ou bien, les “électeurs de gauche” qu’on nous décrit ne sont qu’un autre électorat LREM, des gens friqués et habitants les grandes villes, qui rêvent d’un nouveau “projeeeet” bourgeois, aussi branché que celui de Macron à ses débuts. Simple hypothèse.

Ce sont les élus de ces gens qui s’étonneront de la prochaine insurrection à venir, et déploreront la “crise de confiance”, “le désenchantement démocratique”, “la défiance envers la politique”. Mais comment ne pas haïr votre jeu quand vous traitez les gens avec un tel mépris ? Quand vous vous enfermez dans vos mairies pour célébrer vos médiocres petits strapontins, à déjà réfléchir à comment vous asseoir sur votre (timide) programme ? Quand vous n’avez qu’un mot navré, rapide et routinier, face à l’énorme claque que les abstentionnistes vous ont mise ?


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