Les grévistes de la RATP peuvent ouvrir la voie à tou.te.s les travailleur.se.s pour vaincre Macron

Après la grande démonstration de force du 13 septembre, la grève illimitée à la RATP a démarré très fort, avec un trafic quasi-paralysé sur la plupart des lignes de métro et de bus. Mais ce n’est pas tout. Les décisions prises par les AG dès le 5 décembre confirment, après l’initiative venue de la RATP de poser la date du 5 décembre qui a été le point de départ de la mobilisation actuelle, qu’il s’agit du secteur le plus avancé et qui peut pour cette raison rompre la digue de contention du mouvement déjà posé par les directions syndicales.

Les directions syndicales refusent d’exiger le retrait et demandent l’ouverture de « réelles négociations »

Après une journée de grève et de mobilisation historique, avec la reconduction massive de la grève à la RATP, à la SNCF, dans les raffineries et, à un moindre degré, dans l’éducation, les bureaucrates réunis bien au chaud continuent de refuser d’exiger le retrait pur et simple du projet de destruction de nos retraites Macron-Delevoye. Pire, ils osent demander l’ouverture de « réelles négociations sans préalables », c’est-à-dire sans le retrait préalable du projet Macron-Delevoye ! On comprend que, dès le jeudi 5 décembre, Édouard Philippe ait salué l’attitude des dirigeants syndicaux. Et comme si cela ne suffisait pas, les directions syndicales ont refusé d’appeler à manifester avec les Gilets Jaunes ce samedi et organise de façon séparée une manifestation contre la précarité, au lieu de faire converger toutes les forces des travailleur.se.s.

Les travailleur.se.s à la base exigent : retrait pur et simple ! Aucune concertation avec le gouvernement !

À la base, c’est un tout autre son de cloche. De nombreuses AG dans les dépôts et les attachements RATP ont voté des revendications claires et nettes, demandant le retrait pur et simple du projet de réforme des retraites Macron et exigeant des directions syndicales qu’elles refusent toute concertation. A juste titre : à quoi bon « se concerter » ou « négocier » si on veut le retrait pur et simple du projet ? La participation à des « concertations » ou à des « négociations » ne peut que servir le gouvernement. Cela donne l’impression que le projet Macron-Delevoye pourrait être acceptable moyennant quelques amendements. Et cela offre aussi au gouvernement la possibilité de se présenter comme n’étant « pas brutal », mais ouvert à négocier.

Pas brutal ? Vraiment ? Prétendre reculer fortement l’âge de la retraite, diminuer les pensions de 20%, 30%, voire 40% et frapper les plus précaires et les femmes ? Pas brutale la police de Macron et Philippe qui tabasse les manifestant.e.s (voir ici) ? Pas brutal le refus de revaloriser le SMIC de plus que l’inflation, alors qu’il y a 9 millions de travailleur.se.s pauvres ?

Élections de comités de grève, vers un comité central de grève !

L’autre excellente nouvelle, c’est que dès la fin de la semaine au moins une douzaine d’AGs avaient élu des comités de grève et/ou mandaté des délégués pour des AGs interlignes et un comité central de grève. La situation évoluant d’heure en heure, il est difficile de fournir une liste exhaustive, mais on peut citer à titre d’exemple les lignes 5, 7, et 12 du métro, et les dépôts de bus de Pleyel, Vitry, Montrouge, Thiais…). D’ores et déjà, les grévistes sont en train de rompre l’isolement des AG et de constituer des AG plus massives regroupant les travailleur.se.s de plusieurs terminus.

C’est une façon d’éviter de se retrouver à devoir voter sur la reconduction sans savoir ce que les autres feront ailleurs et développer les liens de solidarité. Mais c’est aussi l’affirmation que la grève appartient aux travailleur.se.s et que c’est à eux de la contrôler, pas à des dirigeant.e.s autoproclamé.e.s. C’est une façon d’empêcher que les bureaucrates syndicaux aillent négocier dans le dos des salarié.e.s, comme ils l’avaient fait en 2003 à la RATP, en arrêtant la grève en échange de la promesse du gouvernement de l’époque de maintenir leur régime spécial. Une promesse qui n’engageait que celles et ceux qui croyaient. Dès 2007, Sarkozy l’a fait voler en éclats et les travailleur.se.s des régimes spéciaux, isolé.e.s, n’ont pas pu se défendre efficacement, malgré une puissante grève.

Porter un programme de lutte capable d’entraîner tou.te.s les travailleur.se.s et de disputer la direction du mouvement aux bureaucrates syndicaux.

Les grévistes de la RATP ont conscience qu’ils ne pourront pas gagner tou.te.s seul.e.s. Il est clair que pour vaincre Macron et le MEDEF il faudra une grève de masse jusqu’au retrait. S’ils parviennent à se doter d’un comité central de grève, les grévistes de la RATP pourront s’adresser à toute la classe ouvrière avec un programme qui permette de mobiliser tous les secteurs, du public comme du privé.

Un programme centré sur le retrait pur et simple de la réforme des retraites Macron-Delevoye, mais incluant aussi l’amélioration massive du système actuel qui conduit à des pensions très basses pour beaucoup de salarié.e.s : retour à 37,5 annuités ; retour aux 10 meilleures années dans le privé ; réindexation sur l’inflation, pas de pension inférieure au SMIC même pour les carrières incomplètes… Un programme incluant aussi des revendications centrales des luttes actuelles ou récentes, comme celles des Gilets Jaunes : tout.e travailleur.se doit toucher au moins le SMIC et celui-ci doit être massivement augmenté, les suppressions de postes et les licenciements doivent être stoppés, partout, le personnel nécessaire doit être embauché au statut dans le public ou en CDI dans le privé, notamment dans les hôpitaux, les crèches, les écoles, à la RATP, à la SNCF, à la poste, à EDF-GDF, à Radio France, etc.

Unifier notre classe

Une telle orientation ferait tomber tout de suite une première digue essentielle pour Macron et le MEDEF : la coupure que le gouvernement a partiellement réussi à construire entre les travailleur.se.s des régimes spéciaux, honteusement présenté.e.s par le pouvoir et ses relais comme des privilégié.e.s, et les autres salarié.e.s. En portant un programme pour tout.e.s les travailleur.se.s, les grévistes de la RATP feraient tomber par leur action révolutionnaire les murs fabriqués par la propagande de BFMTV et consorts et permettraient de braquer les projecteurs sur les vrais privilégiés, les grands patrons, les hauts fonctionnaires et les hauts cadres, tant choyés par Macron depuis son arrivée à l’Elysée.

Dans la même perspective, il faudrait aussi aller à la rencontre des autres travailleur.se.s en grève reconductible, les personnels de l’éducation, des hôpitaux, de Radio France, de la BNF, de La Poste, d’EDF-GDF, les étudiant.e.s, ou en grève les journées de grande mobilisation, comme les ouvrier.e.s et les employé.e.s des grandes entreprises privées. Cela peut se faire par des participations croisées aux AG et par des actions communes.

Déborder les directions syndicales pour battre Macron et le MEDEF

Cela permettra aussi de s’attaquer à la deuxième digue centrale : la politique des directions syndicales qui, en continuant à participer au dialogue social, ne donne pas confiance à notre classe pour s’engager dans la grève jusqu’au retrait et la satisfaction des revendications. Les grévistes de la RATP auraient toute autorité pour s’adresser à Martinez, Veyrier, Beynel et Groison, exiger qu’ils rompent les concertations et appellent enfin à la grève générale pour gagner. Et cela pourrait libérer l’énergie de nouveaux secteurs de travailleur.se.s. Car avant d’entrer sérieusement en lutte, les salarié.e.s se demandent logiquement si elles et ils ont un espoir raisonnable de gagner. Et pour ça, la stratégie et la détermination des dirigeant.e.s est cruciale.

Au-delà des retraites, un combat pour inverser le rapport de forces

Dans une telle configuration, Macron se retrouverait au bord du précipice, contraint de reculer en toute hâte ou de forcer l’affrontement, ce qui risquerait d’entraîner de nouveaux secteurs dans la grève et contribuer à la politisation révolutionnaire des autres, plaçant la bourgeoisie dans une situation encore plus délicate.

C’est que, dans cette mobilisation de masse, au-delà de la revendication essentielle du retrait de la réforme des retraites, c’est un immense ras-le-bol qui s’exprime de tant de violences et de souffrances imposées par le gouvernement du patronat et des plus riches aux plus exploité.e.s et opprimé.e.s., comme l’avait déjà fait éclater il y a à peine plus d’un an le début du mouvement des Gilets Jaunes, qui s’était cristallisé sur l’exigence juste et légitime : Macron, dehors !

Ainsi, peu à peu, commence à se faire jour la conscience que si tou.te.s ensemble nous parvenons à infliger une défaite à Macron, nous ferons basculer le rapport de forces. La peur changerait de camp et les revendications aujourd’hui si difficiles à satisfaire dans chaque bataille partielle pourraient être plus facilement gagnées. C’est un point d’appui pour entraîner de nouvelles couches de travailleur.se.s dans cette lutte décisive.

Articles similaires

Commencez à saisir votre recherche ci-dessus et pressez Entrée pour rechercher. ESC pour annuler.

Retour en haut