Centre de tri du courrier de Lille : mobilisation d’en bas contre pression d’en haut

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SOURCE : Convergences révolutionnaires

Depuis le début de semaine, l’inquiétude s’installe à la PIC (plateforme industrielle du courrier) de Lille. Le site continue de fonctionner alors même que 5 cas suspects de coronavirus y ont été détectés dont plusieurs évacués en ambulance.

Les pubs, c’est vraiment essentiel ?

Dès lundi matin, les premières mesures prises pour contrer l’épidémie du Covid-19 sont dans toutes les têtes. Le gouvernement interdit les rassemblements de plus de 100 personnes, mais à la PIC il y a plus de 700 postiers qui travaillent quotidiennement. La direction nationale de La Poste, visiblement pas très douée en calcul, « tweet » qu’elle entend maintenir « la continuité de ses activités essentielles à la population ». Les discussions vont bon train dans les ateliers, autour des machines et sur les réseaux sociaux. On se demande si trier et envoyer de la pub et le courrier administratif ordinaire est vraiment « essentiel » dans cette période de pandémie. D’autant que pour accomplir ce boulot, des dizaines de milliers de facteurs entrent en contact étroit, non seulement entre eux mais avec le public.

Un service public… quand ça les arrange

Des postiers sont aussi étonnés de voir que l’entreprise parle de « service public » et « d’opérateur d’importance vitale » pour le pays. Quelques jours auparavant, Philippe Wahl, PDG de La Poste, parlait de réduire le nombre de boites aux lettres jaunes. La Cour des comptes préconisait de son côté de ne plus distribuer le courrier que 2 à 3 fois par semaine.

On arrête tous, sauf les profits ?

Les annonces d’Emmanuel Macron, lundi 16 mars à 20h, ont provoqué la stupeur. Les postiers ont réalisé que toute la société était confinée… sauf eux, les ouvriers, les petites mains, bref le gros du monde du travail ! Et à La Poste comme ailleurs : manque cruel de matériels de protection, de masques, de gel dans tous les services. Si une distance de protection de un mètre est instaurée dans la PIC, sur bien des chantiers, la promiscuité ne peut être évitée. Certains agents se demandent si les boites comme La Poste ne devraient pas fermer pour laisser les masques et le matériel de protection aux personnels hospitaliers qui crient dans les médias qu’ils manquent de tout.

Le virus fait son apparition à la PIC

La tension monte encore quand le mardi 17 mars, deux postiers de la brigade du matin présentent des symptômes proches de ceux du Covid-19 et sont emmenés en ambulance. Les agents de production de l’équipe du matin arrêtent le travail et exercent leur droit de retrait. Ils veulent des explications et surtout des mesures de confinement. Le directeur du site descend de son bureau et annonce que les agents qui ont été en contact avec les deux postiers malades peuvent rentrer chez eux mais… pour les autres la production continue ! Bien raisonnable de continuer à travailler dans un espace confiné, peut-être infecté, où le matériel passe de main en main ?

Les droits de retrait se généralisent, la mobilisation se développe

Le message passe vite à l’équipe d’après midi. Plusieurs dizaines d’agents de production annoncent leur intention de se mettre en droit de retrait dès la prise de service. La direction n’ayant que la production en tête, met la pression, rétorque que le droit de retrait ne serait pas valable et menace de considérer les agents comme grévistes. Finalement un CHSCT exceptionnel décide, sous la pression des événements, de « légaliser » les droits de retrait. Une grande partie de l’effectif de l’après-midi rejoint les autres et, toutes et tous ensemble, on rentre chez soi. Les postiers de la PIC ne sont pas les seuls à réagir. Dans plusieurs bureaux de distributions et de collectes autour de Lille, des salariés font valoir leur droit de retrait depuis lundi et font face à la pression de l’encadrement.

Depuis, les cas de symptômes proches de Covid-19 se sont multipliés à la PIC et le site tourne au ralenti avec un effectif très réduit. Une mesure de précaution élémentaire dans ce qui semble devenir un foyer de l’épidémie. Mais pour réagir et défendre la santé des travailleurs, il a fallu que les postiers eux-mêmes, dans les brigades, se mobilisent et décident collectivement. On attend toujours la direction pour fermer temporairement le site.

Les intérêts des travailleurs sont ceux de toute la société

Beaucoup de postiers pensent à juste titre qu’il faudrait limiter le travail au minimum nécessaire comme le courrier des hôpitaux et des entreprises vitales pour gérer l’épidémie. Pourtant tout continue ou presque comme si l’ensemble du travail devait être fait comme avant l’épidémie. La Poste privilégie ses intérêts et certains de ses gros clients, ne veut pas perdre des contrats et donc du chiffre d’affaire. Les profits avant toute chose. Même face à cette crise sanitaire inédite, ce sont leurs porte-feuilles qui devraient primer ! Mais même dans ces conditions exceptionnelles, nous savons contrer leur rapacité.


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