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SOURCE : Rapports de force
Plus de 200 personnes se sont rassemblées devant le CROUS de Montpellier ce lundi 28 septembre à midi, essentiellement des étudiant.e.s et des personnes trans, en souvenir de Doona, une étudiante transgenre de 19 ans qui s’est suicidée à Montpellier le mercredi 23 septembre. Aujourd’hui et demain, d’autres rassemblements sont prévus dans une vingtaine de villes universitaires.
Un quotidien de souffrances et de précarité, c’est ce qu’ont exprimé abondamment plusieurs personnes trans venues témoigner devant les 200 à 250 personnes rassemblées en hommage à Doona, une étudiante trans de 19 ans, dont le suicide, particulièrement violent sous un train en gare de Montpellier la semaine dernière, a créé une onde de choc.
Et un tragique de répétition. « Quand on est trans, on vit avec la mort, la notre, ou celle de nos proches », explique au mégaphone Lola : « il y a 41 % de suicides de plus que dans la population générale ». Une communauté de vécu que confirme Sacha, une toulousaine trans venue à Montpellier juste après avoir appris la triste nouvelle. Pour elle aussi, la question du suicide fait partie de son parcours : « j’avais l’impression que j’allais crever au fond d’un placard. Je suis allée à l’hôpital, on m’a traitée comme une merde ». La violence des institutions médicales à l’égard des personnes transgenres revient dans tous les discours qui se succèdent au mégaphone.
Une violence permanente
La transphobie et la violence ne se résument pas aux agressions physiques contre les personnes LGBTIQ+. Dans le monde médical : la non-reconnaissance de leur identité, la psychiatrisation, des traitements médicamenteux lourds et intrusifs imposés, le flicage pour les personnes souhaitant faire une transition, la culpabilisation, font partie des griefs contre des soignants non formés aux questions transgenres. Mais aussi dans toutes les autres sphères de la société : les sales blagues, les insultes, les représentations erronées, et surtout au quotidien la non-reconnaissance de leur identité. Ce sont toutes ses violence et autant de blessures qui sont exprimées au mégaphone devant les locaux du CROUS, fermés le temps du rassemblement.
Une négation de leur vécu de genre aux multiples conséquences, dans la mesure où la possibilité de changer d’état civil n’est possible qu’après une opération. Un « transition médicale » qui quand elle est souhaitée, est un véritable parcours du combattant. En attendant, la galère ! Tout le temps. Pour se loger, travailler, faire du sport ou toute activité contraignant à présenter ses papiers d’identité. Des documents mentionnant un prénom différent du prénom choisi, celui correspondant à l’identité de genre vécue, et non celle « assignée » au moment de la naissance. « On galère à trouver un travail de par ce qu’on est », raconte une jeune femme métisse. Enfin, c’est souvent l’impossibilité de trouver du réconfort et du soutien dans l’univers familial. « Je suis parti à 18 ans de chez mes parents parce que j’étais en danger de mort », raconte l’une. « Mes parents m’ont dit qu’il allait prier pour que je n’aille pas en enfer », se désole un autre. « Tu ne seras jamais une fille à notre regard », relate une troisième.
Mais ce lundi, la colère s’exprime particulièrement contre le CROUS de Montpellier, accusé par des proches de Doona, Solidaires étudiant.e.s et le syndicat étudiant SCUM de l’avoir menacé d’une expulsion de sa chambre universitaire, si elle tentait à nouveau de se suicider. Des accusations que rejette Pierre Richter dans un courrier en réponse au SCUM dans lequel il invite le syndicat à la retenue et explique qu’il « est mal renseigné ». « L’ensemble des équipes du CROUS a montré un dévouement et un professionnalisme exemplaires dans l’accompagnement de Doona », soutient le directeur du CROUS.
« On ne peut pas laisser nos oppresseurs avoir raison »
« État coupable, CROUS responsable », entonnent les participant.e.s au rassemblement, avant de partir en manifestation. Un défilé qui prend la direction de l’hôpital pointé du doigt par les manifestants, puis de la cité universitaire Verts- Bois, où Donna résidait jusqu’à son passage à l’acte mercredi dernier. Une volonté de rendre visible la réalité de la vie des personnes trans, pour qu’enfin les choses changent. « On ne peut pas laisser nos oppresseurs avoir raison », clame Lola. La colère et la rage sont là, au moins autant que le désespoir et la tristesse.