Pandémie Covid-19: où en sommes-nous ?

AVANT-PROPOS : les articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » ne représentent pas les positions de notre tendance, mais sont publiés à titre d’information ou pour nourrir les débats d’actualités.

SOURCE : Les crises

Enfin une bonne nouvelle ! L’épidémie a cessé sa croissance, comme vous allez le voir.

Nous avons encore travaillé sur de nouveaux graphiques afin de vous aider à mieux comprendre la situation – n’hésitez pas à nous faire part de vos réactions en commentaires.

En ce début de mois d’octobre, nous vous proposons un suivi complet de la situation en France, en Europe et dans le reste du monde. Ce billet sera donc un peu plus long que les suivants, qui se concentreront uniquement sur l’évolution de la situation française.

Pour information, l’audience du recours au Conseil d’État que nous avons déposécontre le Décret du 29 août supprimant la protection des personnes vulnérables Covid-19 aura lieu ce vendredi. Nous vous tiendrons informés de la réponse du gouvernement et du jugement qui interviendra les jours suivants.

Enfin, nous rappelons qu’un bon moyen de nous soutenir simplement consiste à nous suivre sur Facebook et Twitter (ici et ) – merci d’avance !

N.B. : comme on m’a posé la question, je rappelle que ma formation est actuaire-statisticien spécialisé en mortalité : j’ai donc l’habitude de faire ce genre d’analyses.

Plan du billet :

I. Incidence en France

1-1 La situation au niveau national

Voici l’évolution du nombre de nouveaux cas dépistés en France depuis début mai (on ne parle ici que des nouveaux cas détectés par PCR, donc des personnes avec le virus actif dans leur gorge, cela ne compte évidemment pas les tests sanguins d’immunité) :


N.B. nous ne traçons pas les données avant le 11 mai, car cela serait trompeur : à l’époque on ne testait que les cas graves, le total en avril est donc très sous-estimé, d’au moins 10 fois.

On constate donc avec plaisir que l’épidémie a cessé sa croissance exponentielle, et stagne désormais. Néanmoins, plusieurs éléments (comme la saturation de nos capacités de tests et la formation de nombreux foyers d’infection dans le milieu universitaire) doivent nous amener à rester prudents.

Si on regarde la croissance moyenne du nombre de cas hebdomadaires, on a ceci :

On observe donc pour la première fois un net ralentissement, et, probablement, une baisse des cas positifs détectés.

On note bien cette stagnation sur ce graphique représentant la croissance du nombre de cas :

Lecture : quand la courbe bleue est sur fond rouge, l’épidémie est en croissance ; quand elle est sur fond vert, elle est en décroissance. Quand la courbe monte, l’épidémie accélère, quand elle descend, elle décélère. Le nombre de cas a été maximal début avril et minimal mi-juin.

Afin de mieux voir les progrès, voici le taux de reproduction effectif R ; c’est le nombre moyen de personnes infectées par un malade :

Il est sans surprise proche de 1, en raison de la stagnation de l’épidémie.

Enfin, l’évolution du nombre d’Infections Respiratoires Aiguës (IRA) vues en médecine générale confirme l’évolution positive actuelle de l’épidémie :

Nous stagnons désormais à un niveau moyen de 10 000 nouveaux cas par jour, très inférieur aux maxima de mars/avril (5 000 à 8 000 cas graves par jour).

Mais n’oublions pas que le niveau de mi-mars a duré peu de temps : il ne faudrait donc pas rester longtemps à un niveau aussi élevé.

1-2 Les tests

Il y a cependant un léger bémol : on note que le taux de positivité continue d’augmenter, alors que le nombre de tests baisse nettement, les capacités ayant été saturées :

Ainsi, la semaine dernière :

  • 925 000 personnes ont été testées, soit 1,4 % de la population française ;
  • 7,6 % des tests se sont révélés positifs (contre 6,7 % et 5,4 % les deux semaines précédentes) ;
  • 65 % des personnes testées étaient asymptomatiques (ou pré-symptomatiques) ;
  • 62 % des cas positifs étaient symptomatiques, contre 61 % la semaine précédente.

Cependant, comme le taux de positifs augmente, mais que le nombre de tests diminue au même rythme, cela signifie que le nombre de cas testés positifs reste stable.

On observe également que la croissance du nombre de tests réalisés chute depuis trois semaines, et qu’elle est désormais largement négative:

Cette politique de tests tous azimuts a bien saturé nos capacités de détection, de pistage et/ou de testage, en raison de la croissance de l’épidémie.

En conséquence, il serait plus prudent de ne pas utiliser trop facilement le critère du taux de positivité des tests, car il est désormais trompeur.

Rappelons que nous testons près de 1,5 % de la population chaque semaine, et que la Sécurité sociale a identifié près de 210 000 personnes ayant été en contact avec les 81 000 personnes détectées positives la semaine passée :

Identification des personnes-contacts par la Sécurité sociale

On remarque également, sans surprise au vu des effectifs, que l’efficacité de la détection de cas-contacts baisse :

On identifie donc désormais moins de 3 cas-contacts pour chaque cas.

En conséquence, seuls 24 % des nouveaux malades sont des cas-contacts qui avaient pu être précédemment identifiés :

La stratégie de test actuelle pourrait probablement être rendue plus efficiente.

Un point sur les tests PCR. Comme on le voit, ils sont globalement fiables, il n’y pas de gros problèmes de « faux positifs ».

Il est cependant vrai qu’une PCR peut générer un « faux positif » lorsque l’on cherche un seul bout de virus ; c’est pourquoi les biologistes recherchent généralement plusieurs bouts du virus pour écarter tout risque de « faux positif ».

1-3 L’épidémie « réelle »

Comme on l’a plusieurs fois rappelé ici, il ne faut pas commettre l’erreur de représenter ainsi le nombre de cas (testés positifs) depuis février :

Comme on ne testait que les cas très graves au printemps, cela signifie qu’il y avait beaucoup plus de cas réels, non détectés.

Nous vous proposons donc une estimation de l’épidémie RÉELLE, en nous basant principalement sur les travaux de l’Institut Pasteur, afin d’obtenir le nombre de nouvelles contaminations chaque jour :

On note qu’au printemps, l’activité de test (le petit trait en vert) était presque invisible, tant elle était marginale.

La veille du confinement, on devait approcher les 250 000 contaminations par jour ; nous sommes probablement autour de 50 000 actuellement, soit 5 fois moins.

Le taux de croissance hebdomadaire des nouvelles contaminations début mars était d’environ + 300 % par semaine (un quadruplement). Nous sommes donc en ce moment probablement à environ 0 %, sans avoir dépassé il y a quelques semaines les + 50 %, soit 6 fois moins.

Pourquoi ? Non pas parce que le virus aurait changé, c’est une fausse information, c’est le même (voir ici ou ). En revanche, par rapport à début mars :

  • nous avons généralisé le port du masque ;
  • nous appliquons bien plus les gestes barrières (distanciation, lavages de mains…) ;
  • les « gros regroupements » sont interdits ;
  • les « moyens regroupements » sont moins bondés ;
  • les seniors font très attention ;
  • les personnes à risque de forme grave sont protégées par la loi ;
  • beaucoup de salariés sont en télétravail ;
  • les transports en commun sont moins bondés ;
  • un protocole sanitaire prudent est utilisé dans les écoles ;
  • etc.

D’une part, on constate que ce virus est très virulent, car il se répand malgré tout, mais d’autre part, il est très gêné et il le fait 5 fois moins vite.

1-4 Clusters

Il est a noter que beaucoup de nouveaux cas sont issus de foyers d’infection (clusters) bien identifiés (source : Santé Publique France., comme les autres informations sur les tests) :

Alors que jusqu’à il y a peu les foyers étaient principalement situés dans des entreprises, des hôpitaux et le milieu familial élargi., aujourd’hui la source principale est le milieu éducatif :

Et tout particulièrement les universités :

On note donc qu’il se crée dans le milieu universitaire environ une cinquantaine de clusters chaque semaine, comportant en moyenne plus de 24 cas.

1-5 Situation départementale

Voici le niveau départemental actuel de vulnérabilité face à la maladie :

66 départements sont à risque élevé (contre 58 et 46 les deux semaines passées) et 27 à risque modéré (contre 34 et 46).

Pour situer le problème, la situation mi-août était de 3 départements à risque élevé et 21 à risque modéré :

Voici le taux de reproduction moyen par région :

Il est surtout intéressant d’observer le nombre total de nouveaux cas chaque jour par département :

On observe que la grande majorité des départements connait peu de cas chaque jour, donc pas de panique.

Après avoir observé le niveau absolu, il est intéressant d’observer son évolution :

Rappelons enfin que nous déconseillons ici, comme pour les pays, de calculer des taux d’incidence (c’est-à-dire de pondérer par la population). Nous vous expliquerons ceci plus en détail dans un futur billet.

Voici l’évolution en graphique pour les départements les plus touchés :

Le département du 75 est donc désormais le plus touché de la métropole.

Voici le détail pour l’Île-de-France :

On voit que l’épidémie semble ralentir, mais gardons aussi à l’esprit que nos capacités de tests sont saturées.

Et voici où l’épidémie progresse dans le pays :

1-6 Situation par âge

Enfin, point très important, voici le taux de positivité selon l’âge des contaminés :

On constate que les 10-39 ans sont particulièrement touchés, mais que la positivité est en croissance sur la plupart des classes d’âge.

Voici l’évolution pour celles les plus à risques :

L’augmentation chez les plus de 50 ans est inquiétante pour la suite.

Voici ce que cela donne en nombre :

En plus de cette représentation classique, nous vous proposons le même graphique, mais présenté ainsi, afin de bien voir l’évolution pour les plus de 60 ans, population à risque :

Et ici, voici un zoom sur les 50-70 ans et les plus de 70 ans :

On voit bien que l’épidémie frappe surtout les moins de 50 ans pour le moment, d’où le fait qu’il y ait peu de cas très graves, comme nous allons le voir.

II. Hospitalisations en France

La tendance sur les hospitalisations est désormais également à la stagnation autour de 4 000 hospitalisations par semaine (soit quand même 200 000 par an à ce rythme) ; elles ont quadruplé en 2 mois :

Voici la situation journalière pour mieux voir ce qu’ils se passe actuellement :

On peut l’observer en traçant la croissance des nouvelles hospitalisations :

Cela donne ceci sur le nombre total de personnes hospitalisées :

Nous sommes donc bien loin des niveaux du printemps – mais restons prudents malgré tout.


Les réanimations, quant à elles, ne stagnent pas, mais leur progression ralentit :

Voici aussi la situation journalière :

Et voici pour la croissance :

Ce qui donne ceci pour le nombre total de personnes en réanimation :

La déconnexion entre la tendance des hospitalisations et des réanimations montre que la proportion de malades vulnérables aux formes graves de Covid augmente.

Cela s’observe facilement par la dégradation du ratio des nouvelles entrées en réanimation rapportées aux nouvelles entrées à l’hôpital :

III. Décès en France

Voici enfin la situation au niveau des décès en France :

La remontée est plus rapide qu’auparavant, mais la bonne nouvelle est que cette hausse devrait fortement ralentir dans les 2 semaines, et qu’il devrait en être de même des cas et hospitalisations.

Fait plus inquiétant, on note que la situation s’est nettement dégradée dans les Ehpads et autres Établissements Sociaux et Médicos-Sociaux (ESMS) :

Si nous rapprochons le nombre de décès de notre estimation des cas réels, on voit bien qu’il y a un décalage d’un mois entre les pics, et qu’il y avait très peu de décès début mars quand l’épidémie avait le niveau actuel :

Cependant, nous ne devrions pas revivre le même drame qu’au printemps, puisque nous agissons différemment.

Et comme nous agissons différemment, c’est précisément pour cette raison que la situation est meilleure, et non pas pour des raisons « externes » voire « magiques »…

IV. Conclusion pour la France

En résumé : il n’y a pas raison de paniquer, mais la situation restant inquiétante, il nous faut simplement continuer d’être prudents.

La tendance actuelle est ainsi à la stagnation de l’épidémie, mais rien n’est sûr pour la suite : reprise, déclin ou maintien au niveau actuel… Il faudra encore attendre quelques semaines pour y voir plus clair.

Il semble cependant que notre hypothèse d’une épidémie qui se développait en août et septembre surtout à cause « d’imprudents » soit fort possible. Cette catégorie étant limitée, cela pourrait expliquer que l’épidémie ait plafonné. Mais nous verrons dans les prochaines semaines comment les choses évoluent.

Cependant, on remarque l’apparition d’un mauvais signal : le fait que de moins en moins de personnes évitent les regroupements et les réunions en face à face…

Au final, lorsque l’on regroupe tous ces éléments, on ne peut que constater les conséquences du choix de Macron d’un laissez-faire maximal, en laissant tout passer à la trappe : personnes vulnérables, protection des enseignants, interdiction du télétravail dans beaucoup d’entreprises, etc. Dès lors, face à son échec, il est logique de le voir prendre soudain des mesures plus dures…

Dans tous les cas, avec ou sans l’incompétence de nos dirigeants, nous nous devons de rester prudents pendant encore quelques temps afin de cantonner l’épidémie au niveau le plus bas possible.

Et même si nous devons la prendre avec recul, cette stagnation de l’épidémie doit nous amener à garder le moral : il est assez probable que nous surmontions cette vague sans reconfinement général 🙂

V. Incidence en Europe

Voici la situation chez nos voisins européens :

Si l’épidémie semble maîtrisée chez nos voisins allemands et italiens, on remarque une croissance soutenue des cas au Royaume-Uni (certes à des niveaux encore faibles), ainsi qu’une légère diminution pour la France et l’Espagne après une forte reprise probablement due à l’effet vacances...

Voici d’ailleurs une carte plus précise de la situation en Europe. :

Pratiquement aucune région n’est épargnée par la Covid, mais les zones les plus actives sont la France et l’Espagne, et sans doute bientôt l’Angleterre.

On observe sur cette animation la rapide dégradation de l’été :


Comme il y a un retard de 2 à 3 semaines entre nouveaux cas et décès, la situation continue donc à se dégrader en Espagne et en France :

L’épidémie de décès reste cependant très faible par rapport à avril.

VI. Incidence dans les pays les plus touchés

Voici enfin la situation dans les pays actuellement les plus touchés :

La situation en Inde, aux États-Unis et au Brésil reste dramatique – à noter une tendance désormais plus favorable pour ces pays.

Voici un zoom sur l’Amérique latine :

L’Argentine est ainsi le seul de ces grands pays où la situation se dégrade toujours.

Voici pour les décès :

On voit que le nombre de décès atteint des niveaux dramatiques et stagnants dans les pays les plus touchés, avec 800 à 1 000 morts par jour. États-Unis et Brésil ont désormais dépassé le même taux de décès par habitant que la France, alors que l’épidémie est loin d’être terminée chez eux.

Voici enfin la situation des décès en Amérique latine :

Par chance, beaucoup de pays ont pris des mesures de protection des plus âgés (ou bien ils disposent de systèmes sociaux particuliers, ne les regroupant pas dans des Ehpads).

VII. Situation mondiale

Voici pour commencer la carte mondiale de l’épidémie – qui frappe actuellement durement l’Amérique. :

Voici pour le nombre de cas par continent :

On constate que l’épidémie se calme en Amérique, et qu’elle vient probablement de passer son pic en Asie. L’Europe est désormais la seule zone en croissance.

On a ceci en cumul des zones :

L’épidémie plafonne ainsi au niveau mondial avec 250 000 contaminations par jour.

Et on a ceci en cumul des cas :

On constate que l’Amérique a été très fortement frappée, et que l’Asie vient tout juste de la dépasser. L’Europe a également été durement frappée en réalité, mais comme elle a moins testé au début, cela fausse ce graphique au printemps.

Au final, 25 millions de personnes ont été testées positives à la Covid-19 – et beaucoup plus l’ont attrapée, probablement plus de 5 ou 6 % de la population mondiale…


Voici la situation au niveau des décès :

On constate à quel point l’Europe a été touchée, et à quel point le strict confinement a réussi à casser la dynamique de l’épidémie, ce que n’a pas fait l’Amérique.

Le pic des décès quotidiens semble avoir eu lieu en avril, avec 7 000 morts par jour. Espérons qu’il n’y aura pas de forte reprise cet hiver.

Au final, les courbes des décès cumulés ressemblent évidemment aux courbes des cas cumulés :

De nouveau, on voit que la courbe des décès en Europe a connu une très forte croissance au début, qui aurait suivi le chemin de la courbe américaine, et peut être bien pire. Elle a été brisée par les efforts que nous avons réalisés tous ensemble.

Désormais, 1 000 000 de personnes sont mortes de la Covid-19…

VIII. Un dernier conseil Santé

Comme on l’a dit, il n’y a pas de raisons de paniquer face au virus, il faut simplement être prudent.

Cependant, si vous êtes une personne vulnérable (plus de 65 ans, ou plus jeune mais avec des comorbidités, telles que cancer, obésité, diabète etc.) non atteinte par la Covid, ou son (sa) conjoint(e), préférez le port du masque FFP2 / KN95 qui protègent le porteur (plutôt que les masques chirurgicaux bleus qui servent à empêcher les porteurs du virus de contaminer les autres; les masques en tissu ont quant à eux une efficacité variable et discutée).

En effet, si vous croisez des personnes dans des lieux clos mal ventilés (lieux qui favorisent l’aérosolisation), vous serez bien mieux protégés avec ces masques. On peut en trouver dans certaines pharmacies (insistez…) ou sur Internet ; prenez toujours des certifiés CE.


Merci d’avoir lu cet article jusqu’au bout ! Nous espérons qu’il vous a intéressé.

Olivier Berruyer

P.S. Vous pouvez nous suivre sur Facebook et Twitter (ici et ) – merci d’avance pour votre soutien !


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