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SOURCE : Nouvelle vie ouvrière
Tel est l’objet des accords de performance collective (APC) créés par les ordonnances Macron de 2017 qui ont fusionné les anciens dispositifs du même type (Voir A. Le Mire, « Les accords de performance collective », RPDS, 2018, n° 879, p. 227). Aujourd’hui comme hier, il s’agit, par accord collectif, de modifier la durée du travail (suppression de RTT ou de congés, augmentation de la durée de travail sans augmentation de salaire…), de baisser les salaires (suppression de primes, baisse des majorations…) et de modifier l’organisation et les conditions de travail (mobilité géographique, changement de poste…).
Les clauses de ces accords se substituent à celles des contrats de travail des salariés. Si ces derniers les refusent, leur licenciement est réputé justifié et ils ne bénéficient pas de l’accompagnement prévu en cas de licenciement collectif pour motif économique.
Mais ce qui est le plus inquiétant avec les APC, c’est l’absence quasi-totale d’encadrement légal de leur contenu. Selon l’article L. 2254-2 du Code du travail, un APC peut être conclu sans limite puisque pouvant s’appuyer sur les seules nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise. Et les contraintes pesant sur cette dernière ont été considérablement allégées. Informer les salariés sur l’application et le suivi de l’accord et les conditions dans lesquelles les dirigeants et les actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant toute sa durée, n’est qu’une simple possibilité (À savoir).
Ces accords collectifs qui ont déjà le vent en poupe, seront certainement proposés à la négociation dans de nombreuses entreprises dans les mois à venir. Leur force obligatoire sur les contrats de travail et l’absence de contreparties obligatoires de la part des employeurs placent les salariés face à un choix qu’ils ne devraient pas supporter : faire des concessions sur leurs droits ou perdre leur emploi.
Quant aux nouveaux accords mis en place par la loi du 17 juin 2020, dits accords d’activité réduite pour le maintien en emploi (ARME), ils ont la même finalité : faire peser sur le salarié la réduction d’activité, alors que la pérennité de l’entreprise n’est pas menacée, même s’il est vrai que dans ce cadre, l’État finance en partie cette baisse d’activité. Et si la loi précise qu’en contrepartie de la réduction d’horaire, l’employeur prendra des « engagements spécifiques, […], notamment pour le maintien de l’emploi »,cela ne lui interdit pas de licencier les salariés, ni pendant la mise en œuvre de l’accord, ni après.
C’est donc la question centrale que pose ce type d’accord : comment rendre véritablement contraignants et exécutoires les engagements pouvant être pris coté patronal en cas de retour de l’entreprise à une meilleure situation sur le plan financier ? Nous nous risquerons modestement à faire deux propositions qui seraient de nature à sécuriser davantage l’emploi des salariés :
- un expert peut être désigné par le comité social et économique (CSE) pour assister les organisations syndicales lors de la négociation de l’accord, afin d’examiner le bien-fondé des motifs et les informations invoqués par l’employeur à l’appui de son projet d’accord (art. L. 2254-2 du C. trav.) ; pourquoi ne pas prolonger cette expertise (aux frais de l’employeur) pour suivre l’évolution de la situation de l’entreprise ? Cela permettrait aux représentants du personnel de revendiquer un retour à la situation plus favorable antérieure, voire même de récupérer les droitsdont les salariés ont été privés dans l’intervalle.
- ne faudrait-il pas envisager parallèlement la mise en place de mécanismes financiers pour préserver les intérêts des salariés, en obligeant l’employeur à constituer une réserve sur un compte spécifique ?
L’introduction dans la loi de telles mesures contraignantes constituerait un premier pas pour rendre les négociations un peu plus sincères et loyales et un peu moins « revolver sur la tempe ».