AVANT-PROPOS : les articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » ne représentent pas les positions de notre tendance, mais sont publiés à titre d’information ou pour nourrir les débats d’actualités.
SOURCE : Où va la CGT
Quasi subrepticement, un nouvel accord national va rentrer en vigueur le 8 janvier, après des mois de négociations – des années mêmes puisque c’est la continuité du rapport Lecocq élaboré en juin 2018 et qui va bientôt être déposé sous forme de projet de loi à l’Assemblée Nationale, ainsi que des reculs successifs sur les enjeux de pénibilités.
Tous les articles de ce blog sur la pénibilité ICI.
Sans surprise, la CFDT, la CGC, la CFTC et FO vont signer l’accord. Sans surprise non plus, la CGT refuse de signer l’accord sans pratiquement en expliciter le contenu (voir ci-contre). Mais qui est au courant du contenu ? Qui s’est mobilisé ? Qui a suivi les discussions et en mesure les enjeux ? En dehors des quelques bureaucrates syndicaux réformistes – CGT compris – qui ont suivi ces négociations marathon, PERSONNE.
Alors qu’il s’agit des conditions de vie même des prolétaires, avant tout de ces fameux « premiers de corvée » en première ligne face au coronavirus, qu’il s’agit de la pénibilité, de la fatigue, des toxiques chimiques, du stress, des TMS et de toutes ces épouvantables conditions de travail que nous subissons tous les jours au boulot, rien, pas une info syndicale, pas une mobilisation, pas une initiative. RIEN. Et donc l’accord va être mis en œuvre sans que personne ne bronche. Allez, peut-être juste une petite protestation de principe.
Pour ce qui est de la CGT, nos camarades vont bien entendu se féliciter que la Confédération n’ait pas signé. Sans déconner, c’est bien le moins qu’on pouvait en attendre, non ?!!!
Nous publions ci-contre l’analyse du projet, réalisé par l’Association Henri Pézerat, un peu plus fournie quand même que la langue de bois des communiqués officiels (voir le communiqué de notre syndicat, plus haut). Il est essentiel que tous les syndicalistes de classe étudient soigneusement ce texte et les décrets à venir pour se préparer à la résistance et aux mauvais coups qui vont nécessairement suivre.
- Que selon le MEDEF et les signataires, la situation des conditions de travail s’améliore, contre l’évidence. Dans un précédent article de ce blog, nous avions dépouillé dans le détail une enquête statistique très officielle qui prouvait exactement le contraire : « Les statistiques parlent, depuis 30 ans la pénibilité explose ». A relire pour celles et ceux qui auraient des doutes
- Que la bonne démarche est une démarche « commune » et conjointe entre employeurs et salariés, pour une meilleure culture de la prévention. Qu’il s’agit avant tout de « bonnes pratiques » pour favoriser la « qualité de vie au travail », facteur de « réalisation personnelle » pour le salarié. Que pour cela c’est un climat de « confiance » et le dialogue social qui sont moteurs. Que la formation doit être conjointe entre l’employeur et le salarié…
On est là quand même dans le fond du fond de la collaboration de classe. L’exploitation, la subordination réelle du travailleur exploité à l’employeur exploiteur ? Circulez, il n’y a rien à voir !
Il est absolument pathétique que certaines structures de la CGT, comme la métallurgie (mais qui s’en étonnera ?) reprennent ce bavardage (voir ICI) sur la qualité de vie au travail, en abandonnant par exemple le terme de « pénibilité » si significatif de nos vies d’exploités. Les mots sont importants !!
Et dire que la Confédération réussit malgré tout à parler d’« avancées » mêmes maigres de cet accord, c’est vraiment honteux. - Que cet accord opère une bascule de ce qu’on appelle la « prévention primaire » – autrement dit la prévention des risques, vers « la prévention du risque de désinsertion professionnelle ». Autrement dit, ce qui devient l’enjeu principal, c’est le maintien dans l’emploi, quels que soient les risques dont on ne parle plus d’élimination.
- Que dans la même logique, l’employeur n’est plus jugé sur une « obligation de résultats » – garantir de conserver les salariés en bonne santé, mais sur « une obligation de moyens ». Autrement dit, il lui suffira de prouver qu’il a fait quelque chose pour se dédouaner en cas d’accident, ou de maladie professionnelle. En parallèle, la responsabilité du salarié dans le suivi des procédures est également renforcée… C’est l’aggravation d’une tendance apparue il y a déjà quelques années.
- Qu’une partie des fonctions de la médecine du travail, déjà mal en point après de multiples coups de boutoirs du patronat, va être transférée vers la médecine de ville. Celle-ci est également sinistrée, comment imaginer que des médecins non formés et non compétents administrativement vont pouvoir prendre en charge sérieusement la défense des patients – en fait les travailleurs exploités cassés par le travail ?
Un accord très grave donc dans le contenu, mais dont on ne mesure pas encore bien toutes les conséquences, qui vont apparaître peu à peu, entreprise par entreprise, sujet par sujet, mois après mois.
C’était l’occasion de relancer la réflexion et la mobilisation sur la pénibilité, de manière confédérale et unifiée, d’avancer sur une plateforme de lutte commune à tous les exploité.e.s qu’elles ou ils travaillent dans la métallurgie, la chimie, le BTP, les transports, l’hôtellerie, la santé ou autres. L’occasion de parler de leur vraie vie aux travailleurs concernés, et pas de bavardage honteux sur la « qualité de vie au travail » et sur le « climat de confiance » nécessaire avec le patron…
Au lieu de cela, on a eu une négociation clandestine dans les fauteuils des ministères, entre gens de bonne compagnie. Alors bien sûr, la CGT n’a pas signé – encore heureux. Mais qu’a-t-elle fait pour faire avancer la cause des travailleurs exploités, avec eux ??
Pour conclure, nous invitons tous les camarades à relire les articles de ce blog sur le sujet, franchement il y a matière à travail syndical de classe et à mobilisation ! Ne laissons pas le terrain abandonné aux syndicalistes collabos et aux réformistes qui ne veulent rien faire ! Reprenons nos affaires en main, il y a là une vraie question de classe !