Macron insulte la mémoire ouvrière de la Commune, par Robert Duguet

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SOURCE : Arguments pour la lutte sociale

Le Sacré Cœur monument historique !

Macron insulte la mémoire ouvrière de la Commune, par Robert Duguet

L’affreuse basilique du Sacré-Cœur devrait être classée monument historique. Cette décision a été avancée par le préfet d’Île-de-France, Marc Guillaume, donc par Napoléon le tout petit, avec l’agrément de Roselyne Bachelot, ministre de la culture, le soutien de la néo-socialiste Hildago (1), le tout couronné par l’avis favorable de la Commission régionale du patrimoine et de l’architecture.

Après la sortie remarquée de Macron rappelant la mémoire du « grand soldat »que fut le maréchal Pétain, ce gouvernement ne nous épargne rien. Rappelons que pour nous, qui nous situons dans l’héritage du mouvement ouvrier, il n’y a pas deux Pétain, le premier sacré par la bourgeoisie « vainqueur de Verdun » et l’autre qui capitule devant Hitler. Alors que la première révolution russe de février 1917 se déploie, l’offensive du général Nivelle au printemps qui fait 200 000 victimes entraîne un mouvement de révolte au sein de l’armée. Le « grand soldat » Pétain fait fusiller un soldat sur dix dans les régiments mutinés.

Les défenseurs techniques du projet affirment qu’il ne s’agit que d’un « geste architectural », au demeurant parfaitement récusable sur le plan artistique.

Karen Taïeb, élue en charge du patrimoine déclare : « Si la Ville de Paris a émis un avis favorable à l’inscription de l’édifice au titre des monuments historiques, c’est que nous voyons là l’occasion de réconcilier ces deux histoires », et le préfet ajoute :« Notre préoccupation est strictement patrimoniale et vise à s’assurer de la transmission de ce symbole de Paris aux générations futures ».

L’heureux complément de cette politique c’est aussi une attaque contre la loi de 1905. Concernant le régime de propriété des édifices du culte, intégré dans la loi de 1905 et complété par celle du 2 janvier 1907 et du 13 avril 1913, voici quel est leur régime : pour ceux construits avant 1905, ils appartiennent à l’État, aux départements, aux communes. Toutefois, l’aide publique est limitée aux murs extérieurs et au toit, le reste étant à la charge des associations cultuelles qui les gèrent. Pour ceux construits après 1905, ils sont la propriété des personnes privées. Or selon le code du patrimoine, un édifice inscrit monument historique peut recevoir jusqu’à 40 % de subventions de l’État pour ses travaux de conservation et de rénovation, tandis qu’un édifice classé peut bénéficier de subventions sans limites de pourcentages. Il y a donc dessous cette initiative une affaire de gros sous, puisque le Sacré Cœur est avec la tour Eiffel, le deuxième édifice parisien le plus visité par le tourisme étranger.

Mensonges et finasseries qui brouillent les pistes : au-dessus du maître autel de l’édifice, on peut lire « Gallia poenitens » (« La France repentante »). Car ce monument a été imposé quelques mois après l’écrasement de la Commune de Paris, première révolution socialiste de l’histoire humaine. Il sera achevé en 1923. La hiérarchie catholique encadrera les processions religieuses, où les possédants hantés par le spectre de la révolution communaliste chanteront :

« Pitié, mon Dieu ! pour tant d’hommes coupables,

Vous outrageant, sans savoir ce qu’ils font …

Pitié, mon Dieu ! si votre main châtie

Un peuple ingrat qui semble la braver…

Dieu de clémence, ô Dieu vainqueur,

Sauvez, sauvez la France – Au nom du Sacré-Cœur ;

Sauvez, sauvez la France – Au nom du Sacré-Cœur. »

Comme le crime de ceux qui avaient osé prendre le pouvoir a eu lieu à Montmartre, il fallait qu’il soit lavé à cet endroit, là où le prolétariat refusa de livrer à Thiers les canons de la butte, payés par une souscription populaire.

Est-ce le fruit du hasard que cette nouvelle saloperie macronienne arrive à quelques mois du 150èmeanniversaire de la Commune, puisque celle-ci commence le 18 mars et s’achève le 28 mai 1871 ?

Pitoyable manœuvre que jeter l’os de l’Union nationale en ajoutant que le square Louise Michel sera lui aussi classé monument historique : ce gouvernement et ses petits alliés néo-socialistes (Mairie de Paris) salissent le cher visage de celle qui, jusqu’à la fin de sa vie, devenue institutrice laïque, portera jusqu’à son dernier souffle le deuil de la Commune. Bien de nos concitoyens, consternés par la politique de Macron à tous les niveaux, disent qu’il fait n’importe quoi, ou qu’il se tire une balle dans le pied chaque fois qu’il prend une initiative. Cela n’est pas exact. Il y a un fil de continuité dans la politique de Macron depuis son entrée en fonction : le 1ermai 2018 son homme de main, Alexandre Benalla et le préfet Lallement montent une provocation contre la manifestation traditionnelle des syndicats. Pour trouver un précédent, il faut remonter loin en arrière…

La cible reste la même : détruire la liberté de s’organiser face au néo-libéralisme. On connaît aujourd’hui des lois liberticides qui s’appliquent sous couvert de crise sanitaire !

Cela va de pair avec de nouvelles réconciliations entre le trône et l’autel, cœur du bonapartisme. De Gaulle avait commencé le travail avec les lois anti-laïques, Mitterrand au pouvoir s’est coulé dans la défroque du fondateur de la Vème République, Macron continue en plus dégénéré…

(1)Pour celles et ceux qui ont oublié, le courant néo-socialiste français, des Marcel Déat, Gilbert Montagnier et Adrien Marquet, rompt avec Léon Blum et la SFIO pour répondre aux bruits de bottes qui viennent d’Allemagne : plus tard ils rejoindront Pétain…


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