Crédit illustration : Martin Noda

Retour sur le CPN du NPA d’avril 2021

La situation sanitaire rend difficile de façon objective les mobilisations de notre classe depuis maintenant plus d’un an. À ce titre, il est d’autant plus remarquable de voir que la colère ne s’éteint pas et que des luttes se maintiennent, qu’on pense à la timide mais réelle construction de la grève féministe pour le 8 mars, fruit sensible de la crise du covid et du retournement qui s’est opéré autour du travail reproductif et de son caractère essentiel; aux mouvements d’occupation des lieux culturels et artistiques mettant en leur centre le refus de la réforme de l’assurance chômage, et qui pourraient lancer un mouvement d’occupations et une convergence des luttes plus larges; ou aux mobilisations sectorielles qui pourraient en contaminer d’autres, comme la grève des AED et des AESH dans l’Éducation Nationale.

Malheureusement, le NPA est incapable de se saisir de cette situation, paralysé qu’il est lui aussi depuis maintenant presque un an par la menace d’une scission. En outre, chacun·e se sent dès lors autorisé·e à faire ce qui lui plait, en particulier en ce moment sur le terrain électoral. En Nouvelle-Aquitaine (NA), peut-être en Occitanie, des listes communes avec la FI s’organisent pour les régionales sans concertations dans les cadres démocratiques du parti. Or, en NA, la situation est très différente d’avec Bordeaux En Luttes (BEL). Dans BEL, le rapport de force avec les réformistes nous était favorable car il s’agissait d’une alliance par en bas, qui partait des luttes, avec des militant·e·s de l’avant garde, la discussion s’était engagée avec un groupe de la FI particulier qu’on aurait pu éventuellement convaincre du NPA, et la figure connue était Philippe Poutou. Nous avons pu y imposer l’articulation entre les mesures d’urgence et la rupture avec la propriété capitaliste, ainsi que le maintien au second tour face à la liste d’union de la gauche. Ici, ce n’est pas du tout la même configuration : c’est un accord par le haut, entre têtes : dans le jeu institutionnel, bien sûr que la FI est plus forte que nous, et cela transparaît dans l’accord préalable à la campagne, soluble dans un discours keynésien qui entretient des illusions sur les marges de manœuvres des collectivités territoriales. Quel rapport de force va-t-on avoir pour imposer à la FI quoi que ce soit ? Contrairement à un des arguments majeurs qui est avancé en faveur de ce front électoral, qui avance que comme le NPA est en pleine décomposition, ce serait le moment de faire des tests, c’est au contraire le pire moment pour faire ce genre de tests. Quand on fait un front électoral avec les réformistes, il faut un parti révolutionnaire extrêmement fort pour maintenir la ligne et orienter politiquement ce front.

De l’autre côté, le CCR a lancé publiquement la « pré-candidature » d’Anasse aux présidentielles. Bien sûr, Anasse a un excellent profil, comme d’autres camarades, et ce serait symboliquement fort de présenter un ouvrier racisé aux présidentielles. Néanmoins, le fait de procéder hors des cadres du parti et de faire pression depuis l’extérieur approfondit de fait notre crise interne, en plus de briser les rouages de notre fonctionnement démocratique. Il faut aussi critiquer l’argument selon lequel une personne déjà connue fait un·e bon·ne candidat·e : à raisonner de la sorte, on exclura toujours de nos portes-paroles potentielles les personnes sur lesquelles on n’aura pas déjà investi en amont (souvent les plus dominées socialement). Surtout, la rude tâche du porte-parolat s’apprend, elle est le fruit d’un profond travail : à ce titre ce qui compte surtout ce n’est pas tant la personne que l’on présente mais ce qu’elle y porte, donc l’investissement du parti derrière elle. Nous devons trouver une candidature qui soit capable de rassembler la majorité du parti pour une campagne dirigée collectivement.

Nous pensons de notre côté que pour que le NPA sorte de sa crise, il n’y a pas de raccourcis possibles – ni scission ni marasme – : nous n’avons pas d’autres choix que celui de sa refondation révolutionnaire. Il faut faire le bilan de l’échec du projet initial du NPA de parti large, non pas pour développer une parti replié sur lui-même et sectaire, mais pour donner sa chance à un parti ouvertement révolutionnaire, qui exprimerait la radicalité des luttes, tout en proposant une orientation indépendante des directions syndicales et des organisations réformistes, une stratégie pour gagner, et un programme pour socialiser la production et la reproduction. Nous devons et nous pouvons être un parti à l’identité claire et ouverte, capable d’innover théoriquement pour prendre part aux controverses de notre temps tout en maintenant les bilans tirés des expériences passées. Un parti capable d’intervenir avec audace dans les luttes mais sans substitutisme, qui ne confond pas direction politique et contrôle, et qui n’érige pas l’organisation comme une fin en soi. En un mot : un parti révolutionnaire assumé, vivant, et tourné vers l’avenir.

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