Brexit, année zéro

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SOURCE : NPA

Le résultat des élections législatives du 12 décembre dernier paraissait enfin conduire au terme de plus de trois années d’incertitude. Nanti d’une forte majorité parlementaire, le Premier ministre conservateur, Boris Johnson, paraissait assuré d’avoir les mains libres pour enclencher le processus de sortie de l’UE et d’honorer ainsi le slogan répété jusqu’à l’épuisement auto-parodique : « get Brexit done » (il faut faire le Brexit).

Mais ce programme ne s’arrête pas à la seule question des rapports avec l’UE. Avec Boris Johnson s’ouvre une phase réactionnaire d’une agressivité sans précédent. Il y a au moins une raison simple à cela : il y a seulement deux ans et demi, en juin 2017, le parti travailliste dirigé par une gauche socialiste pour la première fois de son existence, fut proche de l’emporter malgré des pronostics uniformément défavorables. L’éventualité cauchemardesque de voir ce scénario se concrétiser en décembre 2020 a vu une mobilisation exceptionnelle des principaux médias contre Corbyn et le Labour (comme l’a documenté une étude de chercheurs de l’université de Loughborough) et une campagne tory (conservatrice) ne craignant plus de recourir à la désinformation la plus audacieuse (faux site de factchecking, faux site de présentation du programme travailliste, entre autres).

Dans un moment de soulagement euphorique, le commentariat britannique, et français à sa suite, n’a cessé de fêter la victoire conservatrice « historique » sans trop s’intéresser à ce qui pourrait nuancer un peu les choses : par la magie du système électoral britannique, les conservateurs, avec 30 pour cent du corps électoral ont obtenu une majorité parlementaire  de 58 % des sièges quand dans le même temps, Le labour dirigé par Corbyn rassemblait plus d’électrices et d’électeurs que T. Blair remportant une majorité absolue en 2005, par exemple.

Pour être bien réelle, la défaite du Labour n’est en rien la révélation ultime de cette anomalie politique fatale que tant (dans la droite travailliste notamment) voudraient éradiquer. S’ajoute en outre à cela le fait le vote des moins de quarante ans en faveur du Labour largement plus élevé que pour les conservateurs. Les signaux ne sont rien unilatéralement négatifs.

Dans ces conditions, il paraît y avoir urgence pour cette droite ouvertement raciste et nationaliste – maintenant acclamée par les personnalités politiques et médiatiques de l’extrême droite britannique et saluée par D. Trump – à lancer une contre-offensive d’envergure contre tous les signaux de reconstruction de la gauche britannique de ces dernières années. À ce titre, il vaut de considérer que la Grande-Bretagne propose ainsi sa propre déclinaison de la lutte acharnée à échelle globale des droites radicalisées et des extrêmes-droites en phase de conquête ou de reconquête du pouvoir.

La recomposition nationaliste de la droite britannique, entre Johnson et Farrage (leader du parti pro-Brexit largement pénétré par l’extrême-droite) , a donc la conjoncture pour elle après des mois de crise parlementaire ininterrompue. Le danger de la gauche est écarté ; les coudées peuvent être franches sur plusieurs fronts et le Brexit, pour faire entendre un point d’orgue à cette hégémonie apparemment retrouvée.

Les sombres complications n’attendent pas, cependant.


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