🎬 Montage fascinant d’archives de l’enterrement de Staline, en 1953.

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SOURCE : Arte

Le cinéaste ukrainien Sergei Loznitsa donne à contempler la nature du totalitarisme avec ce montage fascinant d’archives de l’enterrement de Staline, en 1953.

Le 5 mars 1953, Joseph Staline s’éteint dans sa datcha des environs de Moscou, après avoir terrorisé l’URSS par un règne sans partage qui a duré près d’un quart de siècle. Sa maladie ayant été tenue secrète, la nouvelle frappe de stupeur le pays tout entier. L’État soviétique met sur pied des funérailles grandioses, durant lesquelles d’immenses foules, d’un bout à l’autre de l’empire, rendent hommage au dictateur défunt et, à Moscou, défilent devant sa dépouille. Une douzaine d’opérateurs filment sans relâche, en couleur et en noir et blanc, cet enterrement interminable et géant, de l’annonce radiodiffusée du décès à l’inhumation dans le mausolée de la place Rouge, le 9 mars, après les discours de la garde rapprochée – Khrouchtchev jouant les maîtres de cérémonie pour Malenkov, Molotov et Beria, l’exécuteur des basses œuvres du régime, qui sera fusillé avant la fin de l’année.
Ces cérémonies qui se répètent à l’identique, de Tallinn à Vladivostok, des puits de pétrole azéris au territoire nenets, n’ont finalement jamais été diffusées par la propagande soviétique. Avec ces images largement inédites, et une bande-son qui égrène les dithyrambes surréalistes de la radio, le cinéaste Sergei Loznitsa invite sans commentaire à contempler, entre effroi et fascination, le culte de la personnalité qui a entouré le défunt et, en creux, la terreur qui a cimenté son règne.

Instant suspendu
Que racontent, plus de soixante ans après, ces rituels soigneusement chorégraphiés et, surtout ces milliers et milliers de visages de tous âges, impassibles ou en pleurs, anonymes ou célèbres, saisis par les caméras pour mettre en évidence l’unanimité d’un peuple inconsolable ? Ce montage dans la durée, qui immerge le spectateur dans l’instant suspendu entre l’avant et l’après-Staline, donne à regarder le mystère de ce pouvoir démesuré, qui a fait périr, selon les estimations, plus de 20 millions de personnes, et en a déporté quelque 28 millions. Parce que nous le savons, nous ne pouvons pas ne pas voir les traces du long cauchemar que ces foules hagardes viennent de traverser dans la gigantesque mise en scène de la douleur à laquelle elles se prêtent. Remarquablement restaurées par le cinéaste et son équipe, discrètement sonorisées, les archives font ainsi ressentir, plutôt que comprendre, la nature du totalitarisme, en nous donnant à voir son image, non pas au passé, comme nous en avons l’habitude, mais au présent.


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