Le droit de manifester s’exerce, il ne se mendie pas

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SOURCE : Renverse

Le 27 août 2020, deux procès auront lieu au Palais de Justice de Genève suite à la contestation d’amendes de police. La première, pour sanctionner un « débordement de trottoir » dans le cadre d’un rassemblement devant le Grand Conseil en soutien à Ayop, l’une des victimes de l’incendie du foyer des Tattes de 2014 et ancien requérant d’asile, menacé d’expulsion. La seconde pour un « refus d’obtempérer », lors d’une manifestation en soutien au peuple kurde sur la place des Nations. Deux nouveaux exemples malheureux de répression du droit de manifester.

UNE RÉPRESSION PERMANENTE DU DROIT DE MANIFESTER : RESTRICTIONS, INTIMIDATIONS, SANCTIONS

Depuis l’adoption en 2012 de la nouvelle loi genevoise sur les manifestations, initiée par le procureur général actuel Olivier Jornot, la répression policière de cette liberté fondamentale est devenue la norme cantonale. Les amendes délivrées pour son non-respect sont monnaie courante. Bien que ces dernières soient systématiquement cassées par la justice au tribunal, les forces de l’ordre et plus particulièrement la Brigade d’intervention et d’îlotage communautaire (BRIC) – la police politique – poursuivent obstinément une pratique de limitation de ce droit constitutionnel avec la bénédiction du pouvoir politique et ce, avant, pendant et après les défilés.

En premier lieu, l’imposition d’une demande d’autorisation de manifester, qui doit être déposée au minimum 30 jours à l’avance sous peine de rejet ; une demande tardive entraînant une injonction à déplacer l’événement et des menaces de répression. Il faudra quoiqu’il en soit payer des émoluments de 500 chf si les délais ne sont pas respectés. Considéré comme une limite aux libertés fondamentales, ce régime genevois d’autorisation préalable est unanimement critiqué par les organisations internationales qui invitent à y substituer le principe de la simple annonce des organisateur.trice.s aux autorités.

En second lieu, le rendez-vous avec la police. La personne signataire de la demande d’autorisation devra négocier au poste toutes les modalités deux heures durant : date et heures, lieux de départ et d’arrivée, parcours et encadrement. Certaines artères seront d’emblée refusées, certains lieux symboliques interdits (ambassades, bâtiments officiels), certains dispositifs limités (véhicules, sonos). Un service d’ordre sera systématiquement exigé. À croire que c’est la police qui manifeste !

Durant la manifestation, la police exigera un contact téléphonique permanent. À chaque instant, la personne de référence sera donc jugée responsable de tout le cortège : arrêt, changement de parcours, actions de collage ou tags, etc. Par ailleurs, la présence des policiers en tenue anti-émeute et la pratique de filmer les manifestant.e.s sont systématiques.

Après la manifestation, viendra sans nul doute le moment de la sanction. D’abord les inévitables émoluments, puis les potentielles amendes. Parce que le cortège s’est arrêté 10 minutes (Manifestation pour le logement, 2013), pour dépassement de trottoir (Ayop, 2018), pour non-respect des conditions imposées (8 Mars, 2019), pour manifestation non-autorisée (Critical Mass, 2020), et pour tant d’autres raisons.

POUR DES RUES EN LUTTE ET DES MANIFESTATIONS SANS LIMITES

Aujourd’hui, à Genève, la liberté d’expression et de manifestation doit être reconquise. On ne compte plus les collectifs, organisations et individu.e.s qui ont vu leur demande rejetée, monnayée ou qui ont ensuite été amendé.e.s.

À la suite de la loi Jornot, s’est ancrée l’idée qu’une manifestation ne pouvait exister sans demande d’autorisation. Une évolution législative liberticide a profondément influencé les pratiques militantes. La peur d’une répression policière brutale et le besoin d’en protéger les manifestant.e.s a souvent été à l’origine du choix de se plier aux injonctions des autorités. La dernière décennie a prouvé que les pratiques répressives décrites plus haut n’étaient pas impactées par l’existence ou non d’une demande d’autorisation. Par exemple, les contrôles racistes avant et après les défilés n’ont pas été plus importants durant les nombreux défilés non-autorisés du mouvement No Bunkers, qu’il l’ont été les années suivantes malgré les démarches effectuées.

Nos combats, notre droit de manifester et les manières dont nous voulons l’exercer ne doivent être limités ni par des autorisations, ni par des ambitions politiciennes, ni être un exutoire pour des forces de l’ordre frustrées. Une manifestation, c’est un moment de lutte, de revendication, de vie et de rage, pas un salon de l’auto ni un défilé militaire …

Que fleurissent rassemblements et cortèges et que vivent les luttes ! Reprenons la rue !

Rendez-vous le 27 août 2020 à 9h devant le Palais de Justice et le lendemain, vendredi 28 août à 18h30 au Pont des Bergues pour la Critical Mass.

Coordination genevoise pour le droit de manifester : 
Dont font partie : Association des juristes progressistes / CGAS / SIT / UNIA / Uniterre / Cartel Intersyndical / SSP / Parti du Travail / solidaritéS / Parti socialiste genevois / Jeunesse socialiste / Les Verts / Jeunes Vert·e·s / Comité FreeManifs / Climate Strike Genève / CUAE / Solidarité Tattes / Collectif MNAen lutte / Collectif pour la grève du climat / Coordination climat et justice sociale / Association des Parrainages d’enfants de Palestine / Urgence Palestine Nyon-La Côte / Association 360 / Association STOP TISA / Ligue suisse des droits de l’Homme – Genève / Malagnou Kids / Le Silure.

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