Etats-Unis. Le FBI met en garde contre le terrorisme de droite

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SOURCE : A l'encontre

Par Ken Klippenstein

Le coronavirus ne peut être taxé d’intention frauduleuse en visant Donald Trump qui n’a pas ménagé ses efforts pour l’accueillir. L’attention médiatique va se centrer sur l’état de santé du président en faisant peut-être oublier combien Trump a validé, lors du premier (et dernier?) débat présidentiel, les activités de milices d’extrême droite face aux mobilisations sociales contre les discriminations sociales et raciales. Le rapport du FBI, obtenu par The Nation, éclaire les développements de cette milice. (Réd. A l’Encontre)

Un rapport du FBI, datant du jour du débat présidentiel, 29 septembre, le prédit: une «menace extrémiste violente», celle d’une milice d’extrême droite, est à l’ordre du jour.

Interrogé lors du débat présidentiel pour savoir s’il condamnerait la violence de groupes comme les Proud Boys, le président Trump s’est montré provocateur, remarquant qu’il s’agissait d’un défi: «Presque tout ce que je vois vient de la gauche, pas de la droite.» Mais le même jour, le FBI a publié un rapport d’enquête avertissant d’une «menace extrémiste violente» imminente posée par une milice d’extrême droite qui inclut des tenants de la suprématie blanche – identifiant la période électorale actuelle jusqu’à la prise de fonction de 2021 comme un «point d’ignition potentiel».

Le rapport, obtenu exclusivement par The Nation et intitulé «Boogaloo Adherents Likely Increasing Anti-Government Violent Rhetoric and Activities, Increasing Domestic Violent Extremist Threat in the FBI Dallas Area of Responsibility» [«Les adeptes du boogaloo risquent d’accroître la rhétorique et les activités violentes antigouvernementales, d’augmenter la menace d’un extrémisme violent interne dans la zone de responsabilité du FBI à Dallas»], met en garde contre la menace posée par cette milice d’extrême droite connue sous le nom de «Boogaloos» [cette milice se caractérise par sa préparation à la guerre civile].

Effectué pour un usage officiel uniquement et pour l’application de la loi, le document a été préparé par le bureau du FBI à Dallas. Il est daté du 29 septembre 2020. Il s’appuie sur un large éventail de sources de renseignement, avec une mention spécifique des sources humaines – ce qui laisse supposer que le Bureau (Federal Bureau of Investigation) pourrait avoir des informateurs confidentiels au sein du groupe. Le document met en évidence plusieurs catalyseurs de l’augmentation du nombre de membres du groupe, notamment le ressentiment à l’égard de la perception d’un pouvoir trop ambitieux, incarné par le confinement dû au Covid-19 et l’élection présidentielle.

Le document note:

«Le FBI local de Dallas considère que dans les trois prochains mois, jusqu’à la prise de fonction de janvier 2021 – les élections présidentielles étant un point de tension potentiel – les adeptes du boogaloo vont probablement étendre leur influence au sein de la zone de responsabilité du FBI à Dallas, en raison de la présence d’extrémistes violents antigouvernementaux ou anti-autorités, du sentiment d’abus de pouvoir du gouvernement, des tensions accrues liées aux restrictions locales et étatiques propres au Covid-19, et en raison de la violence ou des activités criminelles lors de manifestations légales à la suite du décès d’un Afro-Américain USPER [US person] à Minneapolis [George Floyd], facteurs qui ont conduit à la violence lors de manifestations, par ailleurs pacifiques et légales dans la zone de responsabilité du FBI à Dallas.»

Le terme «Boogaloo» fait référence à une seconde guerre civile américaine, que le groupe, peu organisé et farouchement anti-gouvernemental, a comme intention de provoquer. Ses membres portent souvent une tenue militaire et une chemise hawaïenne. Bien que les Boogaloos contiennent clairement des éléments de suprématie blanche – de nombreux membres pensent que la prochaine guerre civile sera une guerre raciale – leur principal objectif est l’opposition farouche au gouvernement.

Bien que le scepticisme à l’égard du gouvernement soit sans aucun doute un sentiment commun, les Boogaloos se sont distingués en perpétrant des actes de violence importants pour faire avancer cette croyance. Par exemple, cet été, un Boogaloo, Steven Carrillo, aurait tué deux agents de la force publique en Californie du Nord. Fidèle à la volonté du groupe de hâter la prochaine guerre civile, Carrilllo aurait tué les agents des forces de l’ordre lors d’une manifestation par ailleurs pacifique avec une mitraillette munie d’un silencieux, dans l’espoir de provoquer des représailles de la police contre les manifestants. Plus tard en septembre, deux autres membres de Boogaloo ont été arrêtés et accusés d’avoir fourni un soutien matériel au Hamas. Les deux hommes auraient dit à un informateur du FBI, se faisant passer pour un membre du Hamas, qu’ils partageaient une idéologie commune en s’opposant au gouvernement américain, et auraient proposé d’agir en tant que mercenaires.

Deux sources humaines sont identifiées comme étant au centre de l’évaluation des jugements du Bureau. L’une des sources a fait état de diverses menaces depuis 2017, et certaines des informations rapportées ont été corroborées depuis. Le rapport mentionne une source, qui prétend avoir un «accès direct» aux Boogaloos, citant les intentions d’un membre lourdement armé de «chasser» les anarchistes antifascistes et de tirer sur les éventuels pilleurs.

Ce langage fait écho à celui du président Trump qui, à la suite des troubles civils de cet été, a tweeté: «Quand les pillages commencent, les tirs commencent.» Comme l’a rapporté The Nation en juin, le jour même où Trump a annoncé son intention de désigner les dits «Antifa» comme groupe terroriste, le bureau du FBI à Washington n’a pu trouver aucune preuve de l’implication d’Antifa dans la violence. Cependant, en juillet, The Nation a rapporté que la communauté des renseignements américains suivait une «menace potentielle pour le maintien de l’ordre» provenant du Boogaloos. Alors que les groupes antifa se sont engagés dans des actes de destruction de biens et parfois de violence, une étude récente publiée par le Centre d’études stratégiques et internationales (Center for Strategic and International Studies) a révélé que les groupes antifascistes n’ont pas été impliqués dans un seul meurtre aux États-Unis au cours des 25 dernières années.

Le rapport des services de renseignement conclut en citant les préoccupations des Boogaloos concernant «l’augmentation des “patrouilles” ou de la participation à des événements» favorables à leur cause. On pourrait dire que ces ordres viennent du sommet: lors du débat présidentiel de mardi soir, le président Trump a demandé à ses partisans de patrouiller dans les bureaux de vote. «J’exhorte mes partisans à se rendre dans les bureaux de vote et à observer très attentivement car c’est ce qui doit se passer», a déclaré M. Trump. (Article publié dans The Nation en date du 30 septembre 2020; traduction rédaction A l’Encontre)

Ken Klippenstein est le correspondant de The Nation à Washington DC.


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