Pendant ce temps-là, les sénateurs repoussent l’âge de départ à la retraite à 63 ans

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SOURCE : Regards

En pleine crise sanitaire, économique et sociale, les sénateurs LR n’ont rien trouvé de mieux à faire. À voir comment réagira la Macronie, si ambiguë au sujet des retraites.

Alors qu’à la crise sanitaire s’ajoute une crise sociale sans précédent – et qui ne fait que commencer avec déjà plus d’un million de Français qui ont basculé dans la pauvreté –, les sénateurs n’ont rien trouvé de mieux que d’ajouter de l’angoisse à la précarité. Samedi dernier, le Sénat a amendé le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 afin de repousser l’âge de départ à la retraite à 63 ans. Si les Républicains devraient voir leur amendement retoqué lors de l’examen de l’amendement à l’Assemblée nationale, ils livrent là l’occasion pour le gouvernement de rouvrir le périlleux dossier des retraites. En plein confinement. Et c’est bien là que le bât blesse.

L’attitude de la majorité s’agissant de la réforme des retraites reste encore relativement ambiguë. Et cet amendement venu des rangs des Républicains pourrait tout aussi bien être une aubaine qu’une épine dans le pied de la Macronie. Si pour Emmanuel Macron et Jean Castex, il n’est pas question d’abandonner « totalement » la réforme très controversée des retraites, les syndicats, eux, sont unanimes. Dans un courrier adressé au Premier ministre le 14 octobre dernier, les organisations syndicales avaient déclaré qu’il n’était pas « l’heure de remettre à l’ordre du jour le sujet des retraites ». Dont acte ?

« La réforme n’est pas encore totalement enterrée mais le fait qu’on ait pu écrire avec cinq organisations professionnelles est une force pour obtenir que cette réforme soit complètement abandonnée », a prévenu Catherine Perret, chargée des retraites à la CGT dans La Midinale du 5 novembre dernier. Pour autant, elle ajoute : « Le gouvernement n’a pas encore désespéré de ressortir la réforme des retraites en 2021 puisqu’il a déjà prévu de discuter de la question de la pénibilité et de l’emploi des seniors pour ainsi revenir sur le dossier en déréglementant en matière d’âge légal ». Le gouvernement déjà farouchement contesté sur sa gestion du Covid se risquerait-il à passer en force cette réforme alors que l’opinion la rejette massivement ?

Les mêmes qui voulaient – et qui veulent encore – isoler les plus vieux d’entre nous, dès 65 ans, parce que plus vulnérables devant le virus, ne considèrent-ils pas les plus de 65 ans tout aussi vulnérables face au chômage, aux maladies professionnelles, l’usure physique et psychologique ? Quelle incohérence.

Si avec Sarkozy, tout devenait possible, avec Macron tout est possible – même si certaines voix de majorité estiment que l’amendement LR est « prématuré », à commencer par Brigitte Bourguignon, ministre chargée de l’Autonomie auprès du ministre des Solidarités et de la Santé. Avant d’ajouter que « l’absence de visibilité sur les conséquences de la crise sanitaire sur le système de retraites ». Vu l’impact prévisible de la crise sanitaire sur les finances de l’État et l’économie en général, on imagine aisément ce que cette dernière phrase peut vouloir dire : aller plus loin encore dans le démantèlement de notre système de retraites. Déverrouiller tout. Y compris fixer un nouvel âge de départ à la retraite, assumer l’âge pivot et accélérer l’allongement de la durée de cotisations.

Bienvenue dans le monde, tout aussi prévisible, de demain… Personne ne connaît à ce stade les effets à long terme de la crise sanitaire sur nos vies. Encore moins sur notre modèle social et en particulier sur notre système de retraite. La prudence devrait donc s’imposer. Si les élus, Républicains en l’occurrence, ne retiennent comme leçon de la crise qui est, de même que la crise qui vient, que l’urgence de précariser toujours plus les plus faibles, de travailler plus et plus longtemps pour gagner moins, c’est qu’ils vivent dans un monde à part. Déconnectés. Loin des préoccupations du plus grand monde. Les mêmes qui voulaient – et qui veulent encore – isoler les plus vieux d’entre nous, dès 65 ans, parce que plus vulnérables devant le virus, ne considèrent-ils pas les plus de 65 ans tout aussi vulnérables face au chômage, aux maladies professionnelles, l’usure physique et psychologique ? Quelle incohérence.

Demain, les retraités se mobilisent pour une journée d’actions (dans la rue, sur Internet et les réseaux sociaux ou en écrivant aux parlementaires), partout en France. Et nous devrions tous en être.

 

Pierre Jacquemain


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