AVANT-PROPOS : les articles de la rubrique « Ailleurs sur le web » ne représentent pas les positions de notre tendance, mais sont publiés à titre d’information ou pour nourrir les débats d’actualités.
SOURCE : Arguments pour la lutte sociale
Vendredi 21, dans notre billet éditorial « Où en est l’affrontement avec Macron en France ?« , nous relevions 4 faits :
1) les quelques 2000 manifestants vers l’assemblée lundi 17 signifiant que c’est possible (la montée en masse contre Macron et son assemblée) mais que l’intersyndicale seule, à cette étape, peut … mais ne fait pas.
2) l’appel de l’intersyndicale au 31 mars signifie clairement qu’elle ne veut pas de montée en masse et d’affrontement central, tout en prolongeant pour l’instant la participation à la conférence de financement, quitte à orchestrer une « contre-conférence » ou une « vraie conférence » d’ici fin mars.
3) la faiblesse de la grève RATP le 17 notamment indique le reflux du mouvement sous les formes prises depuis le 5 décembre.
4) Comme la volonté de vaincre demeure à la base, la situation mûrit vers son prochain rebondissement qu’il s’agit d’aider politiquement.
Ce dimanche soir 23 février, trois éléments importants sont à prendre en compte, dont l’un est directement intégré à la réflexion de millions de travailleurs, et l’autre encore peu connu mais mérite d’être porté à la connaissance des militants soucieux d’aider leur classe. Ce sont des éléments vivants et mouvants des processus en cours sans lesquels on ne peut évaluer la situation réelle, qui n’est pas immobile.
Premièrement, gouvernement et groupe parlementaire LREM jouent l’énervement devant « l’obstruction » : au bout d’une semaine, l’Assemblée nationale en est encore à l’article 1 d’un texte qui en comporte 65 (il faut cependant préciser que cet article 1 est d’une longueur et d’un flou démesurés et contient, dans des termes alambiqués, l’essentiel de la loi : dans un parlement réel il serait tout à fait normal que sa discussion ne soit pas terminée à ce jour).
Aucune illusion à avoir sur l’opposition parlementaire à ce projet de loi, mais, par contre, celui-ci est affecté de vraies contradictions du point de vue de l’État capitaliste tel qu’il a fonctionné jusqu’à aujourd’hui : celles qu’a soulignées le Conseil d’État. En fait, ce n’est pas un texte de projet de loi, c’est une sorte de charte, floue, déclinant et appelant d’autres lois futures, n’ayant d’autre fonction que de disloquer et d’araser le régime des retraites par répartition, le code des pensions civiles et militaires, et les régimes dits spéciaux.
L’article 1 tout particulièrement appelle d’autres lois, par exemple sur la « revalorisation salariale » des enseignants et chercheurs. Par cette loi, la V° République tente avec Macron de passer à un nouveau type de textes : des textes d’orientation fixant la seule ligne générale de casse des droits sociaux, et laissant la start-up gouvernementale pondre des directives appelées « lois ». Donc, exécutif et groupe LREM commencent à menacer du 49-3.
En fait, un tel coup d’État leur est d’une certaine façon nécessaire, non pas pour punir les députés oppositionnels dont ils n’ont cure, mais pour réaffirmer la toute puissance de l’exécutif, affaibli par le mouvement d’en bas affirmé par le 5 décembre et ses répliques, et par la crise au sommet à nouveau révélée par l’affaire Griveaux-Pavlensky-Benalla.
Mais la menace du 49-3 signifie pour des millions de travailleurs et de militants que le calendrier de l’intersyndicale avec son prochain « temps fort » le 31 mars ne répond pas aux besoins réels. Elle doit permettre de souligner avec encore plus de force le point d’appui pour l’affrontement central et général que serait une montée en masse vers l’Assemblée nationale avant cette date.
Deuxièmement, les premières informations qui nous parviennent sur la réunion de la Coordination ayant appelé à la première manifestation vers l’Assemblée nationale lundi dernier, tenue ce dimanche dans les locaux de SUD-Rail à Saint-Lazare, indiquent une double tendance au renforcement numérique et au regroupement des initiatives de ce type, la Coordination RATP-SNCF ainsi que les syndicats CGT de la raffinerie de Grandpuits, et de l’Energie-Ile-de-France, ayant participé à une partie de la réunion.
Les débats évitent souvent la question de la responsabilité de l’intersyndicale nationale, tout en s’efforçant d’organiser la lutte par en bas. La coordination RATP-SNCF veut prendre élan et recul, sans se disperser, pour « un plan de bataille débouchant sur une véritable grève générale« . Les délégués et participants de la coordination des AG envisagent de nombreuses dates de lutte culminant à partir des 14 et 16 mars (NB : le 15 premier tour des municipales) tout en maintenant la perspective d’une manifestation centrale à Paris. Leur appel propose une réunion nationale des représentants d’AG, comités de grèves, et sections syndicales le souhaitant, regroupant toutes les initiatives de ce type prises à ce jour, le samedi 7 mars.
Nous ne pensons pas que cette recherche de regroupement et d’auto-organisation soit un feu de paille ou un phénomène minoritaire, car elle nous semble en connexion avec la volonté en bas, dans tous les secteurs qui ont construit le mur du 5 décembre et qui tendent depuis à s’élargir alors même que la première vague se termine, de ne pas baisser pavillon et de préparer la suite.
Troisièmement, nous attirons l’attention de tous sur un fait survenu en Seine-Maritime : la préfecture de Région, soutenu par le Ministère du travail, a exclu le camarade Gérald Le Corre, responsable de l’UD CGT, de plusieurs instances représentatives au motif qu’il est Inspecteur du travail et ne pourrait être « juge et partie » dans des structures traitant des conditions de travail, et le préfet l’a exclu du « Comité de dialogue et de transparence LUBRIZOL » où il était mandaté par son union départementale, la fédération Chimie et la confédération CGT. Ceci est sans précédent : l’État prétend choisir qui représente un syndicat. Ceci est sans précédent, pas tout à fait : le précédent date de 1940, c’était la Charte du travail de Pétain. Et cette attaque sans précédent vise les travailleurs de Rouen et du Havre, les dockers et les ouvriers de tout ce secteur important de la lutte sociale.
Voila qui, avec le 49-3, indique clairement que la victoire revendicative ne passe pas par des « temps forts » de plus en plus distants, mais par la centralisation et la généralisation, qui appellent l’auto-organisation !
Nota :
L’Union Départementale CGT de Seine Maritime, la CGT Normandie, le SNTEFP CGT (Ministère du travail) et l’UFSE CGT appellent à un :
Rassemblement de soutien
Jeudi 27 février 2019 de 9h à 11h devant le Conseil d’Etat,
Place du palais royal à Paris.
Une attaque contre un est une attaque contre tous ! Ne laissons pas passer les atteintes à la liberté syndicale !