Entretien avec K, conducteur de métro à Paris : « Il y a vraiment un deux poids deux mesures »

Nous nous sommes entretenus avec K, conducteur de métro à Paris, sur les conditions de travail et la gestion faite par la direction de la RATP dans le cadre de la crise sanitaire du coronavirus.

Peux-tu nous raconter tes conditions de travail actuellement ? Quels sont les rapports avec la direction, quelles sont les consignes ?

Dans le cadre du coronavirus il y a beaucoup d’incohérences. Je travaille dans un secteur stratégique : celui du transport. On nous demande de travailler, de continuer à transporter des voyageurs-ses se rendant à leur travail. Ça peut sembler compréhensibles, mais c’est une première incohérence avec les mesures consistant à vouloir freiner ce virus.

Nos responsables semblent ne pas avoir d’informations, nous fonctionnons au jour le jour. Nous avons eu la distribution de gel hydroalcoolique au début (100ml) contre émargement (signature). C’est censé durer jusqu’au bout car d’après nos responsables, il n’y a plus de stock. Des kits d’intervention nous sont fournis (masque gant et lingette) mais nous devons les rendre après chaque service, démultipliant ainsi les manipulations. Encore une fois, nos responsables évoquent qu’il n’y en a pas assez, mettant de côté la question de l’hygiène, de la santé. On nous incite à nous laver les mains très fréquemment mais dans des terminus il n’y a même plus de papier pour s’essuyer ou du papier toilette.

On marche à vue, avec beaucoup d’incohérences et très peu de préparation. Nous sommes inquiet-e-s car nous constatons bien que la direction ne met pas réellement les moyens afin de nous protéger ou qu’il y a du retard à l’allumage. En tout cas, c’est à chaque fois pareil : ce n’est que quand on se plaint que les choses bougent doucement. La direction n’a mis en place qu’hier des mesures afin de laisser des collègues rester chez eux (en astreinte) afin de diminuer la présence inutile de certain-e-s collègues, et de tourner ainsi avec les effectifs. Nos responsables semblent ne pas avoir de consigne particulière, ils et elles semblent également inquiet-e-s à mon avis.

Est-ce qu’il y a beaucoup de voyageurs-euses ?  

Très peu. Nous baladons des banquettes plus qu’autres chose. 2 ou 3 voyageurs-ses par station, rarement une dizaine de voyageurs-ses, vraiment rarement. C’est ridicule : nous n’arrêtons pas d’en discuter entre collègues avec nos supérieurs. Pour le coup, les voyageurs-ses qui empruntent le métro ne risquent pas d’être à l’étroit.

Comment les gens confinés pourraient vous soutenir ?

Qu’est-ce que nous pourrions exiger ? De réels moyens de protection, de prévention. Nous travaillons dans un environnent habituellement pollué, ce n’est plus à démontrer. Nous prenons énormément de risques avec ce virus avec cet environnements fermé. Notre salaire aussi n’est pas suffisant alors que nous faisons bien parti des secteurs stratégiques qui sont sollicités afin permettre la continuité du service public. Il y a des collègues qui étaient absent-e-s en début de semaine et pourtant, je n’ai vu personne de l’encadrement venir les remplacer alors que lors du dernier mouvement social, pendant la grève, ils étaient tous sur le pont. Il y a vraiment un deux poids deux mesures. Ça montre qu’ils pensent à leur santé à eux, pas à la nôtre. Dans tous les cas, ne prenez pas les transports, sauf cas de force majeur. Ça nous aidera à dénoncer l’absurdité de la situation.

Si on avait la main sur tous les transports, idéalement, qu’est-ce qu’on ferait ?

Si j’avais la main sur les transports, je serais partagé entre tout arrêter mais aussi maintenir une sorte de service minimum, pour permettre certains déplacements indispensables. Je sais que nous travaillons dans un secteur stratégique et du rôle de la mission que nous remplissons, mais encore une fois les moyens ne sont pas au rendez-vous.

 

Propos recueillis par Tristan Daul

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