Le Plan, sitôt recréé sitôt trahi !

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SOURCE : Regards

François Bayrou, le fraîchement nommé Haut-Commissaire au Plan, a présenté le 22 septembre sa méthode et son agenda devant le Conseil Économique Social et Environnemental. Il avait reçu une lettre de mission du président de la République dont l’AFP nous a appris, le même jour, que celui-ci lui avait demandé d’être particulièrement attentif à la question des inégalités. « Je considère que la prise en compte du long terme est pour notre temps une impérieuse obligation. Elle a été, ces dernières décennies, trop absente des mécanismes de la décision publique ». La phrase aurait été réellement audacieuse si elle avait visé l’incapacité dramatique de l’État français à prévoir et à organiser, et si le Président avait donné mission au Haut-Commissariat d’en proposer un diagnostic et de mettre en débat les réformes structurelles. Le court-termisme, la tragédie des horizons ne sont pas simplement le fait de l’État mais du capitalisme financiarisé.

Le discours de politique générale du Haut-Commissaire Bayrou a été d’une grande platitude. Il a fustigé « l’idée que notre action publique devait s’effacer entièrement devant les initiatives privées », affirmé pénurie de masques et paracétamol à l’appui que « la préoccupation des profits est parfaitement légitime pour une entreprise privée ! Mais lorsque les intérêts particuliers contredisent l’intérêt général, alors il y a un devoir de la puissance publique, un devoir de la démocratie de les prendre en charge. »

Le Haut-Commissaire s’est accordé, un large rayon d’action. Il a listé trois grands thèmes de travail.

  • La « vitalité de la France », ce qui recouvre selon lui les champs de l’écologie, de la démographie, de l’identité, de la francophonie, de la recherche et de l’innovation.
  • « L’indépendance » par quoi il faut entendre les chantiers des relocalisations, des productions vitales, de la souveraineté agricole ou de la dette publique…
  • Enfin, la « justice ». Ce qui renvoie sans doute à l’injonction d’être attentif aux inégalités. On parlera donc, éducation puisque « l’éducation, c’est la justice en actes » ! Mais aussi santé, aménagement du territoire, développement : « Je pense par exemple à l’Afrique, aujourd’hui trop souvent en déshérence, alors que sa jeunesse et sa volonté de défricher l’avenir sont remarquables. Si nous ne parvenons pas à élaborer une réponse à cette question, alors nous rencontrerons des drames inéluctables…C’est un enjeu à la dimension de l’Europe toute entière. Encore faut-il que la France montre l’exemple et le chemin ! »

Au-delà de ces promesses qui n’engagent que ceux qui y croient, la feuille de route auto-dressée par le Haut-Commissaire Bayrou a aussi quelque chose d’effrayant. On y cherchera en vain l’objectif du plein emploi. Et même, m’a-t-il semblé, le mot emploi n’a pas été une seule fois prononcé.

Emmanuel Macron a donc « recréé » le Commissariat au plan. Mais en même temps, lui-même et le Haut-Commissaire désigné abandonnent l’objectif sociétal majeur qui était au centre de sa mission. Alors même que la crise actuelle aura un impact considérable sur l’emploi, le Plan devrait plus que jamais se fixer l’objectif sociétal d’un plein et d’un meilleur emploi dans un nouveau mode développement.

 

Bernard Marx


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