Ce texte est une contribution au débat de deux camarades de l’ex Plateforme A pour le CPN du NPA de septembre 2023 qui envisage la perspective d’une alliance avec la FI pour les européennes. D’autres positions ont aussi été défendu lors de ce CPN par d’autres camarades de l’ex Plateforme A, notamment la perspective d’une campagne sans candidat.
Le CE du NPA discute actuellement de faire une proposition d’alliance à la FI pour les européennes. Si nous ne sommes pas opposés par principe à cette politique, nous pensons qu’elle doit s’accompagner de gardes fous et de conditions. Notre position finale n’est pas encore arrêtée et ce texte vise à lancer le débat sur le sujet.
Les raisons d’une potentielle alliance
Le NPA prévoit de publier une tribune concernant les élections européennes, et nous saisissons cette opportunité pour en discuter lors du CPN des 23 et 24 septembre. L’objectif actuel est de participer d’une manière ou d’une autre à ces élections en défendant les positions traditionnelles du NPA. En particulier, la commission Européennes et le CE du NPA souhaite s’adresser à La France insoumise, afin de leur proposer une alliance électorale. Il y a plusieurs raisons à cela :
1/ Un contexte spécifique au sein de la NUPES
En effet, nous devons tenir compte du contexte de crise au sein de la NUPES pour ces élections, qui oppose la FI au PS, aux Verts et au PC. Ce contexte nous laisse paradoxalement une fenêtre de tir, que nous n’avions pas aux dernières législatives. Il y a en outre un enjeu à renforcer le bloc autour de la FI par rapport aux forces bourgeoises du PS et d’EELV.
2/ L’enjeu de la reconstruction du NPA
De son côté, le NPA est en plein processus de reconstruction, après une scission qui a été, qu’on le veuille ou non, coûteuse en militantEs, en argent et en implantation. Les élections sont pour nous des points d’appui dans cette reconstruction : ni les seuls points d’appui, ni les principaux, mais ils constituent de fait des moments de politisation pour l’ensemble de la société et de visibilisation pour les partis. Nous pouvons difficilement faire la fine bouche face aux élections européennes vue la situation.
3/ L’absence d’alternatives
Par ailleurs, il y a peu d’alternatives au NPA pour ces élections : nous n’avons pas l’argent pour nous présenter seulEs, et nous devons acter l’impossibilité de nous adresser dans l’état actuel au reste des organisations d’extrême-gauche avec lesquelles nous partageons pourtant de profondes convictions communes. Cela laisse peu de choix, une alliance avec la FI ou une campagne sans candidats.
Lignes rouges, stratégie et programme
Ces dernières années, la question des alliances électorales avec des réformistes (ici la FI) n’a pas pu être posée de façon dépassionnée au sein de notre organisation, alors que traditionnellement dans le courant trotskyste il n’y avait pas de religion en la matière : en effet, notre stratégie étant révolutionnaire et non pas institutionnelle, notre courant a toujours considéré les élections comme un enjeu tactique, et beaucoup de tactiques ont alors été envisagées et mises en place dans son histoire. Mais l’absence de clarification au sein du NPA a longtemps empêché d’avoir cette discussion, avec la crainte légitime que se cache un enjeu stratégique derrière un enjeu tactique, et que le NPA risque la dissolution dans la FI. Aujourd’hui, nous pouvons aborder ces élections de manière plus sereine. Cela n’empêche pas qu’une telle alliance ne pourrait se faire sans deux choses :
1/ Fixer des lignes rouges, comme nous l’avions fait lors des élections législatives
-En aucun cas le PS (ou un de ses équivalents) ne doit être associé à un tel accord.
-Cet accord reste électoral et n’implique pas que notre parti participe à la reconstruction d’une quelconque gauche plurielle.
-Le NPA doit garder sa totale indépendance politique, programmatique et organisationnelle pendant et après la campagne.
-Nos éventuel·le·s élu·e·s seraient aussi libres et ne voteraient pas systématiquement avec la France Insoumise.
2/ Avancer dans notre projet, notre stratégie et notre programme
Par ailleurs, si nous optons pour cette voie et si nous envisageons sérieusement une alliance aux élections européennes avec la FI, cela ne pourra être que sur la base de mesures d’urgence, comme la création d’un SMIC européen, la rupture avec les traités de l’UE ultralibérale et l’accueil des réfugiéEs. Mais nous devons au préalable renforcer notre programme et notre identité, de manière à ce que nos positions propres, communistes et révolutionnaires, soient clairement visibles, identifiables et puissent se distinguer (a minima des gens qui s’intéressent à nous) des mesures d’urgences qui résulteraient d’un compromis pour les élections européennes. Concernant la stratégie et le programme, nous avons des divergences de nature avec la FI et non pas seulement de degré. Nous souhaitons bel et bien sortir du capitalisme en créant une économie socialisé. Le projet de la FI est quant à lui une rupture avec le néolibéralisme, et a pour pierre angulaire de son programme une relance keynesienne qui engendrerait une croissance permettant de financer les mesures sociales de son programme[1][2] .Pour mettre en œuvre un véritable programme de rupture avec le capitalisme (et non pas juste avec le libéralisme), il ne pourra pas suffire de passer par les urnes et de s’appuyer sur une simple délégation auprès de quelques élu.e.s, aussi sincères et radicaux soient-ils. Cela nécessitera une véritable révolution et un haut degré d’auto-organisation afin de rompre profondément avec les institutions françaises et européennes et de résister aux capitalistes qui s’opposeront à l’application d’un tel programme de rupture.
C’est pourquoi le CPN, s’il devait acter de proposer une alliance électorale avec la FI, devrait également acter de la mise en place d’une commission programme pour ces mêmes élections, qui n’en reste pas à un programme d’urgence, mais réfléchisse activement à des mesures transitoires que nous pourrions mettre en avant dans notre campagne, ainsi qu’à des argumentaires montrant les limites de la logique réformiste et la nécessité d’une révolution.
S’appuyer sur l’Union Populaire ?
Par ailleurs, si nous nous engageons dans un tel processus de discussions avec la FI en vue des européennes, il est essentiel de réfléchir à notre relation avec l’Union Populaire (UP). En effet, il faut se préparer à l’éventualité de l’échec au niveau national de la NUPES avec le PS, les Verts et le PC et au retour à l’UP sur le devant de la scène. Dans ce cas-là, l’UP pourrait potentiellement devenir un pôle radical et populaire contre le gouvernement, le libéralisme et l’extrême droite, sans la participation du PS et des Verts et avec la FI en tant que principale force réformiste, mais aussi avec des personnalités du mouvement social, des intellectuelLEs et quelques petites organisations comme la gauche éco-socialiste (GES) et le POI. Par conséquent, nous devons envisager de nous appuyer sur ce pôle, que ce soit en interne ou en externe, afin de renforcer le rapport de force national face à Macron et l’extrême droite. Cela doit se faire tout en préservant notre indépendance totale en tant que parti et en profitant de cette opportunité pour diffuser nos idées communistes et révolutionnaires, et sans toutefois avoir trop d’illusions de transformer ce pôle à dominante réformiste en quelque chose qu’il n’est pas.
Renouveler le porte-parolat
La publication d’une tribune pour les européennes et une éventuelle conférence de presse qui en découlera nécessitent aussi d’aborder la question de l’incarnation de la campagne. Il faudra bien évidemment s’appuyer fortement sur touTEs nos porte-paroles actuelLEs pour mener cette campagne. Mais ce serait aussi l’occasion de mettre en avant de nouveaux profils jeunes (et évidemment féminisés et/ou racisés) pour renforcer notre engagement et notre construction envers la jeunesse ! Une organisation vivante doit se construire prioritairement dans la jeunesse : les élections européennes seraient aussi l’occasion d’avancer dans cette direction.
[1] https://melenchon2022.fr/2022/03/12/emission-chiffrage/
[1] https://melenchon2022.fr/2022/03/12/emission-chiffrage/
[2] https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/02/21/keynesianisme-effet-multiplicateur-sur-quoi-s-appuie-le-programme-economique-de-melenchon_5082897_4355770.html
