2019 : une année noire pour le revenu des paysans

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SOURCE : L'Humanité

L’Humanité, 3 juillet 2020

Dans une note publiable à partir de 12H30 ce vendredi 3 juillet, l’INSEE indique que pour l’année 2019, les prix des céréales au départ de la ferme étaient en baisse de 12,2% par rapport à 2018, ceux des fruits étaient en recul de 3,5%. Si les prix des  productions animales ont été en légère hausse, cette dernière est surtout due aux achats de viande porcine par la Chine. Ajoutons que 2020 promet déjà d’être pire que 2019 pour le revenu paysan.

Nous évoquions, ici même, mercredi dernier, le risque de voir les prix agricoles baisser au départ de la ferme en 2020 tandis que de plus en plus de consommateurs auront de plus en plus de mal à se nourrir  du fait des pertes d’emploi un peu partout dans le monde. Ne pas avoir les moyens de manger à sa faim concerne aussi de plus en plus de ménages France, où les organisations caritatives voient affluer de plus en plus de gens venir récupérer des paniers de denrées de première nécessité.

Notons en passant, que ce sujet ne fait l’objet d’aucun commentaire dans l’entretien que le président Macron a accordé aux quotidiens régionaux de ce vendredi. Mais, en totale opposition avec la réalité, il ose affirmer  que « nous sommes en train de bâtir un modèle de protection qui n’a jamais existé». S’il affirme  que « nous allons très fortement revaloriser les situations  des  personnels médicaux et non médicaux », il n’a pas un mot  concernant la situation du monde  paysan, dont l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) publie aujourd’hui les comptes sur l’année difficile vécue par le monde paysan en 2019, alors  que l’année  2020 promet encore d’être pire.

Une baisse de 14,1% en volume  et de 15,8% en valeur pour le vin

Selon les calculs de l’INSEE, « en 2019, la production de la branche agricole hors subventions sur les produits baisserait en valeur de -1,6% », en moyenne. Car « la production végétale décroît nettement (- 4,3%  alors que la production animale augmente (+ 2,5%).  Mais nous retrouvons à travers la lecture de ces chiffres, les difficultés du monde agricole que nous mettions en exergue voilà deux jours. L’INSEE indique que la production viticole est en baisse de -14, 1% en volume en 2019  et que les prix reculent aussi de -2% durant la même année, ce qui se traduit par une baisse de 15,8% en valeur. Ajoutons que la mévente depuis le début du confinement en  2020 a encore fragilisé  les exploitations viticoles via un recul des ventes, débouchant sur une augmentation des stocks. S’agissant des céréales leur hausse en volume est de 14,2% tandis que le prix baisse de 12,2% par rapport à 2018.

Toujours selon l’INSEE, « le prix de la production animale (hors subventions) augmente (+ 3,8%), du fait essentiellement du fort redressement de celui du porc (+ 21,5%). Le marché est dynamisé par la forte demande chinoise, leur cheptel ayant été décimé  par la peste porcine africaine. Le prix de  production des gros bovins fléchit légèrement (-0,3%) et celui des veaux baisse franchement (-5,5%). Le prix des volailles repart  à la hausse (+ 2,9%) », note l’Institut .

Des coûts de production en hausse occultés par l’INSEE

Alors que le prix des gros bovins a légèrement baissé en 2019, on sait que les coûts de production ont augmenté sensiblement durant la même année  du fait du manque d’herbe résultant de la sécheresse estivale qui s’est prolongée jusqu’au milieu de l’automne. Mais les conséquences vont bien au-delà car il a fallu acheter des fourrages pour passer l’hiver faute d’avoir récolté du foin en quantités suffisantes. Ce handicap vaut aussi pour la production laitière. L’INSEE estime que le prix du lait a augmenté  de +3,6% sur l’année 2019 en moyenne, mais ne produit aucune estimation sur l’évolution des coûts de production. On apprend encore, que toutes filières confondues « la  production animale décroît légèrement en volume (-0,4%), les prix augmentent modérément (+2,6%).

Si les prix des fruits ont baissé de 3,5% au départ de la ferme en 2019,  ceux des légumes ont augmenté de 1,6% en moyenne sur l’année. Mais  on sait que certains légumes se vendent durant de longs mois après la récolte. C’es notamment le cas des pommes de terre dont de gros volumes étaient voués à destruction dès le printemps 2020 du fait de la fermeture  des restaurants dans les villes et villages comme dans les entreprises. Au final, selon l’INSEE, « la valeur brute ajoutée de la branche agricole diminuerait  (-5,4%) sous l’effet de la production au prix de base (-1,6%) – c’est-à-dire y compris les subventions sur les produits- et de l’augmentation des consommations  intermédiaires ».

Vers une année 2020 encore plus difficile

D’où cette conclusion finale de l’Institut : « après prise en compte des subventions, d’exploitation et des impôts, la valeur ajoutée brute au coût des facteurs diminuerait de 4,6%  en 2019. L’emploi agricole décroît  tendanciellement avec même une accélération du recul de l’emploi non salarié. Ainsi, la valeur ajoutée brute au coût des facteurs  de la branche agricole par actif baisserait  de 3,1%.  En termes réels, elle se réduirait  de 4,3%… ».

Rappelons que 2019 était l’An 1 de l’application de la loi EGALIM à travers laquelle  Emmanuel Macron promettait aux paysans que les prix agricoles seraient désormais fixés en France à partir des coûts de production. Les chiffres fournis par la note 1.805 de l’INSEE ce  3 juillet 2020 nous montre qu’il n’en est rien. Ajoutons que l’année en cours promet d’être pire que 2019. Fin juin  2020, le prix du porc charcutier est de  1,34€ contre  1,50€ un an plus tôt. Celui du broutard charolais est de 2,66 € le kilo en vif contre 2,80€ l’an dernier. La tonne de blé rendue à Rouen est payée 174€ comme l’n dernier. La tonne de maïs est à 163€ contre 170€ un an plus tôt, selon les chiffres publiés par « La France Agricole » de ce 3 juillet 2020. Pour l’élevage, la sécheresse va encore augmenter les coûts de production et la récolte céréalière est déjà annoncée avec des baisses sensibles de rendements par rapport à l’an dernier.

Gérard Le Puill


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