Ricochets politiques de l’élection à la hussarde de Pierre Bell-Lloch à Vitry-sur-Seine

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SOURCE : 94 citoyens

Ricochets politiques de l’élection à la hussarde de Pierre Bell-Lloch à Vitry-sur-Seine

L’élection de Pierre Bell-Lloch (PCF) comme maire de Vitry-sur-Seine, contre sa tête de liste, a été vécue comme un séisme dans sa famille politique et les répliques ne vont pas manquer, à commencer par un schisme au sein de la section locale. Le premier rendez-vous très attendu ce lundi est celui du Conseil départemental dont le nouvel édile est vice-président. Au-delà, ce retournement de situation aura un effet rebond au territoire et dans les priorités programmatiques à Vitry-sur-Seine. Le nouveau maire veut notamment plus de logement très social.

Un affront, un putsch, une trahison… difficile d’analyser autrement la séquence ahurissante de ce samedi pour le maire sortant de Vitry-sur-Seine, Jean-Claude Kennedy, sorti du jeu par une majorité des élus PCF aidés de tous les colistiers EELV et de d’une partie des socialistes. Tour d’horizon des conséquences politiques locales de ce troisième tour singulier.

Pour rappel du contexte, lire : 
Pierre Bell-Lloch double Jean-Claude Kennedy et devient maire
Comment s’est tramée l’élection surprise de Pierre Bell-Lloch

La section PCF de Vitry-sur-Seine tranche en faveur de Bell-Lloch

Premier effet rebond : le grand déballage des luttes internes qui couvaient au sein de la section communiste vitriote. Après avoir adoubé à plus de 80% Jean-Claude Kennedy, comme tête de liste début 2019, au terme de négociations pour éviter d’avoir à trancher entre le maire sortant et son adjoint, celle-ci a officiellement pris position en faveur du nouveau maire. « Le samedi 4 juillet monsieur Pierre Bell Lloch a été élu maire à la majorité absolue dès le premier tour, à 27 voix sur 53 membres du conseil municipal, dans le plus strict respect du code des collectivités territoriales et de la démocratie, dans ce scrutin de liste qu’est l’élection municipale. La légitimité de ce scrutin est incontestable, tout comme l’est l’élection des 15 maires-adjoint.e.s qui composent l’exécutif municipal, élu.es à 33 voix sur 53 membres du Conseil », indiquent ainsi les secrétaires de section dans un communiqué. Le groupe PCF du Conseil municipal est également majoritairement en faveur du nouveau maire.

Pétition et entrée en résistance pour les militants restés fidèles à Kennedy

Tous les militants PCF de Vitry ne sont pour autant pas sur cette ligne et pour ceux qui considéraient comme logique que la tête de liste soit élue maire, le scrutin de ce samedi constitue un véritable hold-up. D’ores et déjà, la résistance s’organise et une première réunion autour de Jean-Claude Kennedy est organisée dès ce mardi soir au Kilowatt. En attendant, une pétition a été lancée sur Change.org pour « laver la tache de Vitry »Voir la pétition. Au sein du Conseil municipal, cette fracture se matérialisera désormais par la constitution de deux groupes distincts.

Le PCF Val-de-Marne condamne

Au-delà de Vitry-sur-Seine, le secrétaire départemental du PCF, Fabien Guillaud-Bataille, a dénoncé une « perfidie » orchestrée e huis clos par « une poignée d’élu.e.s constitués en clans, bien loin des valeurs portées par cette liste avec à sa tête Jean-Claude Kennedy. » « Pour la fédération du Val-de-Marne, un tel acte est inacceptable. Nous appelons celles et ceux de nos camarades qui y ont pris part à démissionner des postes obtenus ce matin », appelait le secrétaire départemental ce samedi.

Le PCF National se désolidarise et appelle à l’unité

La direction nationale du PCF a également pris position en indiquant « se désolidariser de telles pratiques » et a exprimé son amitié à Jean-Claude Kennedy. « Nous souhaitons qu’au plus vite le Parti communiste et la majorité des élus de Vitry retrouvent leur unité dans l’intérêt des populations », conclut le PCF dans un bref communiqué. Pour certains militants, Pierre Bell-Lloch doit être exclu du mouvement.

« Ce n’est pas une première à Vitry » réagit Pierre Bell-Lloch

« Il n’y a pas d’exclusion au PCF, cela a été retiré des statuts », commente le nouveau maire tout en soulignant que le fait q’une tête de liste ne siège pas comme maire à Vitry-sur-Seine n’est pas une première, rappelant l’élection de Marcel Rosette en 1965, après une campagne derrière le maire sortant Clément Perrot. A ceci près que c’est Clément Perrot qui avait cédé son siège à l’intéressé…

Quelle réaction au Conseil départemental ?

Alors que se tient ce lundi 6 juillet la dernière séance plénière du Conseil départemental avant l’été, la réaction de son président Christian Favier est désormais très attendue. Va-t-il ou non maintenir Pierre Bell-Lloch dans l’exécutif ? Le nouveau maire de Vitry est actuellement 14ème vice-président chargé de l’insertion professionnelle, de l’emploi, de la formation, des relations avec le monde du travail, de l’économie sociale et solidaire, du commerce équitable, de l’eau et de l’assainissement.

Priorités politiques à Vitry-sur-Seine : pas de contractualisation avec l’Etat, davantage de logement très social…

Sur le plan politique local, Pierre Bell-Lloch entend bien revisiter l’aménagement urbain de la ville, en pleine transformation. « Nous allons travailler à une densité équilibrée en accord avec nos alliés écologistes. Nous serons également très vigilants sur la typologie des logements sociaux. Nous veillerons à ce qu’il y ait suffisamment de logement adapté aux foyers les plus pauvres (logements PLAI) », insiste Pierre Bell-LLoch. Dans son communiqué, le groupe des élus PCF ajoute que l’équipe« réinterrogera dès a présent la fusion de l’Office public de l’habitat et de la Semise ». Le nouveau maire indique par ailleurs qu’il rejettera la contractualisation budgétaire avec l’Etat.

Le nouvel exécutif de Vitry-sur-Seine
1e adjoint : Djamel Hamani
2e adjointe : Sarah Taillebois
3e adjoint : Khaled Ben Mohamed
4e adjointe : Fati Konaté
5e adjoint : Albertino Ramaël
6e adjointe : Catherine Su
7e adjoint : Luc Ladire
8e adjointe : Isabelle Ougier
9e adjoint : Shamine Attar
10e adjointe : Bernadette Ebode Onbodo
11e adjoint : Abdallah Benbekta
12e adjointe : Sonia Guenine
13e adjoint : Valentin Ierg
14e adjoint : Fabienne Lefebvre
15e adjoint : Ludovic lecomte

Conséquences au territoire

Actuellement, le territoire Grand Orly Seine Bièvre est dirigé par Michel Leprêtre, élu PCF soutien de Jean-Claude Kennedy, lequel lui a transmis son mandat de conseiller métropolitain dès le début de la séance. En tant qu’élu métropolitain (qui va siéger à la Métropole du Grand Paris), il devient conseiller territorial de droit, ce qui sécurise sa place au territoire. Cécile Veyrunes-Legrain, également soutien de l’ancien maire, est aussi conseillère métropolitaine et donc conseillère de territoire. Les autres conseillers territoriaux seront élus lors d’un nouveau Conseil municipal samedi 11 juillet. Le Conseil de territoire d’installation, lui, se tiendra le mercredi 15 juillet. Au total, Vitry-sur-Seine, ville la plus peuplée du département, doit fournir 13 conseillers territoriaux sur les 92 du territoire. Le poids de la ville, surtout au sein de la majorité de gauche du territoire, est donc loin d’être neutre et la scission au sein du groupe PCF pourrait avoir des conséquences… ou pas. « Nous n’avons pas de problème a priori avec Michel Leprêtre qui n’a pas fait de déclaration tonitruante à l’issue du Conseil », laisse entendre Pierre Bell-Lloch.

EELV Vitry applaudit, EELV 94 enquête

Concernant l’union locale de la gauche, les réactions sont contrastées. Du côté des écologistes, la section locale d’EELV est partie prenante de la majorité et les 9 écologistes de la majorité ont clairement affiché leur soutient à Pierre Bell-Lloch. Du côté de de la fédération val-de-marnaise, on prévoit de prendre position après analyse précise de la situation et enquête interne pour vérifier si les discussions pour faire respecter l’accord d’alliance PCF-EELV ont justifié un tel retournement. « Nous savions qu’il y avait des difficultés à faire respecter l’accord électoral mais c’est malheureusement le cas de beaucoup de villes. En revanche, nous n’avons pas été informés de ce retournement de situation. Sinon, nous en aurions informé le régional pour convoquer une cellule de crise avant le conseil municipal d’installation », indique Nadine Herrati, co-secrétaire EELV Val-de-Marne pour qui l’enjeu local est désormais de rassembler sur des questions concrètes de terrain les écologistes, partis les uns sur la liste Kennedy et les autres sur liste de Frédéric Bourdon, avec 9 élus d’un côté et 7 de l’autre.

Le PS de Vitry partagé, le PS Val-de-Marne appelle à retrouver l’unité

Dans les rangs du PS, les positions sont partagées. Lors de l’élection du maire, une partie des voix socialistes ont été en faveur de Pierre Bell-Lloch et quatre élus PS figurent bien dans l’exécutif dans le respect de l’accord d’alliance PCF-PS, à commencer par Sarah Taillebois, élue 2ème adjointe. Au niveau départemental, Jonathan Kienzlen a condamné la méthode et appelé au rassemblement. « La démocratie ne sort pas renforcée de cette situation, alors même que les Français se sont détournés des urnes lors de ces élections municipales. La Fédération PS du Val-de-Marne regrette que la majorité municipale n’ait pas été en mesure de trouver une solution de consensus, et que la logique institutionnelle faisant de la tête de liste municipale le futur maire d’une ville n’ait pas été respectée. La Fédération PS du Val-de-Marne souhaite que la majorité municipale retrouve au plus vite son unité dans l’intérêt des populations », enjoint le premier fédéral. De son côté, Luc Carvounas, maire d’Alfortville et député de Vitry-sur-Seine il y a peu, a carrément demandé aux 4 adjoint PS de démissionner de l’exécutif.

La France Insoumise condamne, dans la lignée du groupe Vitry en Mieux

Le groupe LFI local a également dénoncé cette élection à la hussarde, dans la lignée de la tête de liste qu’elle soutenait, Frédéric Bourdon. « Nous
dénonçons nous aussi les tromperies pendant la campagne : quand la plupart croyait voter Kennedy en mettant un bulletin dans l’urne pour la liste majoritaire, ils votaient en réalité pour un autre. (…) Nous ne pouvons que prendre acte de ce qui s’est passé ce samedi 4 juillet, et de la façon dont cela s’est passé, même si tout cela ne présage hélas rien de bon en matière de déontologie et de transparence », 
indiquent David Montava et Nina Seron.

Un contexte chaud bouillant pour préparer les prochaines élections départementales

La prise de pouvoir municipal de Pierre Bell-Lloch arrive en pleine séquence électorale, alors que se profilent des élections départementales très critiques pour la majorité communiste. Bastion PCF, Vitry-sur-Seine a bien résisté à la vague qui a emporté Villeneuve-Saint-Georges, Valenton, Choisy-le-Roi et Champigny-sur-Marne et, ville la plus peuplée du département, elle compte quatre conseillers départementaux. De quoi peser dans la majorité, à condition de mener une campagne un minimum sereine. En plus de de devoir composer avec des alliés qui réclameront un rééquilibrage de leurs forces en présence, le PCF va aussi devoir calmer les tensions internes pour que les candidats communistes fassent campagne d’une même voix.

Législative partielle, un des nouveaux adjoints EELV se propose comme candidat …prêt à siéger dans le groupe PCF

Concernant la législative partielle, la candidate PS destinée à reprendre le mandat de Luc Carvounas a été désignée en la personne d’Isabelle Santiago, vice-présidente du département et adjointe à Alfortville. A Vitry-sur-Seine, Abdallah Benbetka, co-secrétaire du groupe local EELV de Vitry et nouveau maire-adjoint dans l’équipe de Pierre Bell-lloch, a d’ores et déjà commencé à défendre sa candidature en appelant à une alliance PCF-EELV. « Des pourparlers se poursuivent de manière satisfaisante pour aboutir à une candidature commune entre le PCF et EELV avec une candidature titulaire EELV », annonce l’élu avant de se proposer. « Abdallah Benbetka, artisan principal pour EELV de la dynamique victorieuse du rassemblement et de l’accord de mandature municipal signé avec le PCF (…), se porte candidat », s’avance l’adjoint qui ajoute qu »Il s’est proposé d’intégrer le groupe communiste à l’assemblée nationale en cas d’élection. » Les deux fédérations PCF et EELV Val-de-Marne, indiquent pour leur part n’avoir eu aucune connaissance de cette suggestion.

Lire aussi le point de vue de Danielle Bleitrach


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